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Analyse-Livres & Auteurs-Culture

Le scrutin du 29 avril 2012

Une campagne sous haute tension

Repères : carnet de voyage : Tour de Grèce

Dans l’article précédent, il a été présenté les raisons qui ont conduit la Gazette Littéraire à proposer un feuilleton prenant en toile de fond un pays proche de la Grèce ; il est temps de préciser le propos de la nouvelle :

La petite république d'Hellénia vit le dimanche 29 avril 2012 un moment historique : elle propose un référendum sur le maintien du pays dans l'Union Européenne.

La campagne bat son plein. Un parti cristallisant le mécontentement de la classe politique classique surgit. Le PAM, le parti anti monétaire, propose la sortie de l'euro mais surtout l'abandon de toute monnaie avec l'adoption d'un régime basé sur le troc...

***

Âgé de vingt-cinq ans, célibataire sans emploi, Alexis Grivas se rendit à son bureau de vote de la capitale, Philèna, vers dix heures après son jogging dominical. Il avait parfaitement compris l'enjeu de la consultation nationale. Après un long mûrissement, il se sentait prêt à voter pour le non ; il s'était mis à croire en un système non monétaire. Au demeurant, il avait fort peu d'avoirs ; l'idée de ne procéder qu'à du troc ne lui faisait aucunement peur. Au contraire, de son point de vue, le juste échange remettrait le travail, délesté de toute contrepartie monétaire et ainsi de toutes charges sociales à un moindre coût. Ingénieur informaticien, le jeune homme pourrait enfin trouver un emploi, chose impossible depuis les deux précédentes années où il ne vivait que d'expédients indispensables à sa survie. Loin de voter par dépit et par colère, son bulletin se voulait une véritable adhésion à un projet porteur d'espoir. Il n'était pas le seul dans cet état d'esprit. Sa génération, sacrifiée sur l'autel de la croissance, partageait son sentiment. Ces jeunes privés d'avenir représentaient plus de 25% des chômeurs. Une situation dramatique pour un pays prêt à des concessions, mais pas à sacrifier sa jeunesse. La quarantaine affichée, Sofia Nastase, employée de bureau, se fit un devoir de voter en ce dimanche matin. Elle voyait l'occasion de dire combien le passage à l'euro avait été un leurre. Elle souhaitait ardemment le retour au drachme qui la rassurait dans cette période d'instabilité. Un drachme, c'est du vrai ! disait-elle. Derrière elle se trouvait un autre électeur, Georgio Arripolos, la cinquantaine triomphante, qui mit avec assurance son bulletin dans l'urne ; pour lui, la réponse ne pouvait qu'être positive. Européen convaincu, il ne pouvait concevoir son pays en dehors de l'Europe. Un temps révolu qu'il ne voulait pas revivre. Il avait assez entendu ses propres parents souffrir toute leur vie pour qu'il ne regrette pas le passé. Il ne concevait pas qu'un nouveau destin puisse être envisagé pour l'Héllénia. Il n'imaginait pas au demeurant un vote contraire à ses vœux... L'affluence se faisait ainsi nombreuse dans tous les bureaux de vote du pays ainsi que les sondages l'avaient prévu. Placées sous haute tension, les élections avaient imposé de recourir à l'armée disposée aux alentours des centres électoraux. Des caméras surveillaient en outre la régularité des opérations. Devant l'enjeu crucial pour l'Europe, des observateurs de l'Union s'étaient même invités afin de s'assurer de la sincérité du vote. L'État n'avait pas eu le choix que de les accueillir afin de rendre le scrutin aussi irréprochable que possible. La tension était donc bien palpable.

 En ce 29 avril 2012, les résultats du scrutin furent enfin révélés à vingt heures. Le non l'avait largement emporté avec plus de 55% des voix. L'Hellénia avait ainsi manifesté son souhait de quitter la partie. Le jeu européen se ferait désormais sans elle. Le gouvernement présenta le soir même sa démission. Des élections législatives allaient donc se tenir dans la prochaine quinzaine. Dans quelle voie le pays se dirigeait-il ? Les réactions se firent nombreuses dans la plupart des capitales de l'Union. La consternation et la crainte semblaient être partagées par les dirigeants européens. Cela créait en effet un fâcheux précédent. L'incendie qui couvait dans l'eurozone pouvait se propager maintenant à d'autres pays, la Grèce en tête. Tout était désormais possible. Ce petit pays venait de l'indiquer au monde ; il revendiquait son droit à recouvrer sa pleine souveraineté. L'Hellénia entendait reprendre en main son destin. L'Europe recevait pire qu'une bonne leçon, un coup de poignard dans le cœur par l'un de ses membres. Sofia Nastase regardait avec satisfaction de son téléviseur les résultats prononcés. Son quotidien ne pourrait être que meilleur puisqu'il n'avait jamais été aussi difficile...Dans la rue, la population en liesse manifestait avec allégresse. Alexis Grivas se trouvait parmi la foule en joie qui scandait la démocratie pour le peuple et par le peuple ! A bat l'Europe ! Quelques drapeaux rouges flottaient çà et là. Des Hélleniens en grand nombre restaient tapis chez eux de stupeur et d'effroi devant les conséquences funestes pour leur pays. La consternation et le désarroi passés devant le retour à un système archaïque, Georgio Arripolos, lui, se mit à organiser méthodiquement les conditions d'une nouvelle vie... ailleurs.

Repères à suivre : La crise de l’Hellénia (3)

Le scrutin du 29 avril 2012
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L
Si un tel référendum avait eu lieu le maintien à l'euro l'aurait remporté. Ce que les Grecs refusent ce sont les "mémorandums" successifs dictés par la troïka
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