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Analyse-Livres & Auteurs-Culture

Qu'est-ce que la générosité ? (Voltaire)

Qu'est-ce que la générosité ? (Voltaire)

Repères : hors-série d'hiver



Venons-en au fait : quelle est la définition de la générosité ? La réponse la plus précise se trouve dans un dictionnaire.

La Gazette Littéraire vous propose de découvrir la portée de ce terme grâce à un auteur du XVIIIème siècle : Voltaire.

Dans son dictionnaire philosophique, nous aurons en effet une vue exhaustive de cette notion sublime en ce qu'elle est avant tout altruiste puisque l'homme est animal social.

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"La générosité est un dévouement aux intérêts des autres, qui porte à leur sacrifier ses avantages personnels. En général, au moment où l’on relâche de ses droits en faveur de quelqu’un, et qu’on lui donne plus qu’il ne peut exiger, on devient généreux. La nature, en produisant l’homme au milieu de ses semblables, lui a prescrit des devoirs à remplir envers eux. C’est dans l’obéissance à ces devoirs que consiste l’honnêteté, et c’est au delà de ces devoirs que commence la générosité. L’âme généreuse s’élève donc au-dessus de l’intention que la nature semblait avoir en la formant. Quel bonheur pour l’homme de pouvoir ainsi devenir supérieur à son être ! et quel prix ne doit point avoir à ses yeux la vertu qui lui procure cet avantage ! On peut donc regarder la générosité comme le plus sublime de tous les sentiments, comme le mobile de toutes les belles actions, et peut-être comme le germe de toutes les vertus : car il y en a peu qui ne soient essentiellement le sacrifice d’un intérêt personnel à un intérêt étranger. Il ne faut pas confondre la grandeur d’âme, la générosité, la bienfaisance et l’humanité : on peut n’avoir de la grandeur d’âme que pour soi, et l’on n’est jamais généreux qu’envers les autres ; on peut être bienfaisant sans faire de sacrifices, et la générosité en suppose toujours ; on n’exerce guère l’humanité qu’envers les malheureux et les inférieurs, et la générosité a lieu envers tout le monde. D’où il suit que la générosité est un sentiment aussi noble que la grandeur d’âme, aussi utile que la bienfaisance, et aussi tendre que l’humanité : elle est le résultat de la combinaison de ces trois vertus, et, plus parfaite qu’aucune d’elles, elle y peut suppléer. Le beau plan que celui d’un monde où tout le genre humain serait généreux ! Dans le monde tel qu’il est, la générosité est la vertu des héros ; le reste des hommes se borne à l’admirer. La générosité est de tous les états : c’est la vertu dont la pratique satisfait le plus l’amour-propre. Il est un art d’être généreux : cet art n’est pas commun ; il consiste à dérober le sacrifice que l’on fait. La générosité ne peut guère avoir de plus beau motif que l’amour de la patrie et le pardon des injures. La libéralité n’est autre chose que la générosité restreinte à un objet pécuniaire ; c’est cependant une grande vertu lorsqu’elle se propose le soulagement des malheureux. Mais il y a une économie sage et raisonnée, qui devrait toujours régler les hommes dans la dispensation de leurs bienfaits. Voici un trait de cette économie. Un prince donne une somme d’argent pour l’entretien des pauvres d’une ville ; mais il fait en sorte que cette somme s’accroisse à mesure qu’elle est employée, et que bientôt elle puisse servir au soulagement de toute la province. De quel bonheur ne jouirait-on pas sur la terre si la générosité des souverains avait toujours été dirigée par les mêmes vues !

On fait des générosités à ses amis, des libéralités à ses domestiques, des aumônes aux pauvres."

 

Dictionnaire philosophique, Voltaire,

http://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_philosophique/Garnier_%281878%29/G%C3%A9n%C3%A9reux_g%C3%A9n%C3%A9rosit%C3%A9

 

Repères à suivre : générosité, mode d'emploi : la prodigalité

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