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Le rôle "énergivore" du désir chez Balzac

  • Photo du rédacteur: Marie-Noëlle Parisot-Schmitt
    Marie-Noëlle Parisot-Schmitt
  • il y a 19 heures
  • 4 min de lecture

Dans le champ du roman énergétique, le désir figure la vie. Il implique un choix à faire, celui que Raphaël effectue entre la sagesse qui permet de vivre longtemps et d’autre part, le vouloir qui brûle l’existence et le pouvoir qui la détruit. Dans la Peau de chagrin, la métaphore du feu qui consume évoque l’interdépendance entre le désir et le raccourcissement du temps, soit entre le désir et la mort. Deux femmes sont l’objet du désir de Raphaël, Fœdora et Pauline. Le refus de la première le pousse dans la débauche et l’acceptation de la seconde le conduit à voir sa vie se raccourcir. Balzac consacre le poids destructeur du désir…


deux mains qui se serrent
Mains, aquarelle, litteratus


Balzac s’est intéressé à une autre source d’énergie : le désir. Celui-ci résulte d’un choix à effectuer.


Choix

Le désir est défini comme “l’action de désirer.” On note qu’il s’agit d’une action, c’est-à-dire d’un mouvement, entrant dans le champ du roman énergétique.

En l’occurrence, un choix est à effectuer. Par définition, un choix implique deux termes distincts.

On a vu le pacte souscrit par Raphaël : il a eu à choisir entre, d’une part, la sagesse vantée par l’Antiquaire centenaire et d’autre part, le vouloir et le pouvoir. Il s’agit de deux aspirations non seulement différentes, mais opposées.

La sagesse repose sur une quête du savoir. L'antiquaire explique que l’étude l’a conduit à ménager ses ressources vitales déployées dans le domaine intellectuel et non dans les plaisirs charnels.

Le désir de sagesse est donc présenté comme un désir de conservation de soi, de prolongation de sa vie, une sorte d'élixir de jouvence. 

Or, Raphaël rejette ce mode de vie. Il a pratiqué l'étude qui l’a mal payé en retour puisqu’il a vécu dans la misère et dans la solitude. Il choisit donc le vouloir et le pouvoir.


Feu

Le vouloir et le pouvoir sont présentés par l’antiquaire avec la métaphore du feu : le premier brûle, le second détruit. 

Si l’on parle de feu, on peut alors comprendre l’emploi des termes métaphoriques : la combustion, la chaleur, la vapeur : ils appartiennent au vocabulaire issu des sciences physiques. On sait que Balzac a voulu parler de l’homme comme d’un élément doté d’énergie comme la nature.

Une liaison est à effectuer entre vouloir et pouvoir : il faut voir un glissement du premier vers le second : le vouloir se transforme, se convertit en pouvoir comme le désir en réalisation.


Mort

Balzac fait le lien entre le désir et la mort. Le désir brûle en effet les ressources vitales, ce qui est fort bien exprimé par un critique* :

 “On ne peut comprendre la signification profonde d’une oeuvre comme la Peau de chagrin sans se rappeler que Valentin est un être qui n’est pas simplement condamné à mourir, mais qui est condamné à subvenir de moment en moment à la continuation de sa propre existence par des actes qui impliquent la diminution correspondante de cette existence.”

Dans cette perspective, l'auteur considère qu’exister, c’est désirer et désirer, c’est mourir un peu tous les jours. On comprend alors le rôle "énergivore" du désir chez Balzac.

La seule solution serait de s’empêcher de désirer et de vivre en économisant ses fonctions vitales. 

C’est ce qu'essaye de faire Raphaël dans la troisième partie du roman, en vain. 

Nous verrons une application du désir dans le domaine de l’amour : le rôle des passions. 

Appliquons le poids destructeur du désir à son champ de prédilection, la passion.

Dans ce terme passion, il faut certes imaginer un sentiment amoureux, mais qui serait poussé à la démesure.


Le rôle "énergivore" du désir chez Balzac

Dans La Peau de chagrin, deux femmes sont l’objet du désir de Raphaël, Fœdora et Pauline. Le refus de la première le conduit à conclure le pacte et le pousse dans la débauche ; l’acceptation de la seconde le pousse à chaque désir vers la mort. Le désir assouvi ou non assouvi mène à la destruction.


Fœdora

Raphaël rencontre Fœdora qui tout d’abord l’intrigue, avant de le fasciner. Ce qui l’attire chez elle, c’est paradoxalement l’amour qu’elle lui refuse.

Sur le plan du roman de l’énergie, on reste sur une polarisation extrême : le oui de Raphaël et le non de Fœdora. Les forces contraires sont à l'œuvre. 

Cette opposition décuple ainsi l’énergie vitale de Raphaël : son imagination s’enflamme. Il rêve du corps de cette femme, il s’introduit dans sa chambre et la contemple. Son désir d’elle ne s'émousse pas : le rêve de volupté est un puissant moteur d’énergie. 

La raison cède alors le pas devant les sentiments. Plus il l’aime, plus le bonheur s’éloigne.  

Toute cette énergie jamais canalisée est mise alors dans la débauche.


Débauche

C’est la passion interdite par Fœdora qui conduit Raphaël via le talisman à la débauche. La passion du corps, la sexualité, joue un rôle important dans le schéma énergétique du roman. Les sens sont présents et notamment les plus importants, la vue et le toucher.

Raphaël entend épuiser toute sa force vitale non par l’enjambement d’un pont, mais par l’assouvissement de tous ses désirs et son corollaire, le rétrécissement de sa durée de vie. C'est une autre forme de suicide.


Pauline

Avec elle, l’amour est partagé. Le bonheur ne sera que de courte durée puisque l’assouvissement de ses désirs lui coûte un peu plus sa vie.

Il vous est proposé l’étude analytique portant sur la mort du héros dans l’article suivant.


sources : 

Larousse

*Georges Poulet, Etude sur le temps humain (2°) : la distance intérieure, chapitre 4, Balzac, agora Pocket , page 168


 

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