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"La Rage de l'expression" (Ponge)

  • Photo du rédacteur: Marie-Noëlle Parisot-Schmitt
    Marie-Noëlle Parisot-Schmitt
  • il y a 3 heures
  • 13 min de lecture

Bac : Les programmes officiels nous invitent à analyser le sens et la portée du recueil de Francis Ponge la Rage de l'expression. Le cadre proposé s'inscrit dans un parcours intitulé : dans l'atelier du poète. Analysons ensemble le choix du titre, 

le contenu du recueil, la démarche poétique entreprise, l'inventaire de l’atelier de Ponge avant de voir la portée de son œuvre.


palette de peinture avec pinceau et tube
La palette de litteratus

la rage de l'expression

Les programmes officiels nous invitent à analyser le sens et la portée du recueil de Francis Ponge la Rage de l'expression. La formulation proposée implique de définir les termes choisis.


Ainsi l'atelier renvoie au travail de l'artisan, du peintre, de l'artiste en général. L'association de l'atelier au poète est donc au cœur du sujet. Il nous est demandé d’analyser la poésie dans sa “fabrication”.

Pourquoi une telle orientation ?

C’est que Ponge a choisi lui-même, avec cette œuvre, de mettre en lumière les travaux préparatoires à sa poésie : il a mis en lumière ce qui nous est habituellement caché et en a fait la matière pure de son recueil. 

Pour reprendre la métaphore de l’atelier, on aurait ainsi accès aux études (esquisses, détails, croquis etc.) et pas seulement au résultat final, la peinture elle-même.


Plan

Nous allons donc nous saisir de cette singularité en vous proposant la problématique suivante :

Comment Francis Ponge conçoit-il l’art poétique ?

Nous verrons les protestations de Ponge sur son propre statut de poète.Il convient de procéder à la présentation du recueil avant toute analyse :

Brève biographie de Ponge

Voici quelques éléments-clefs de la biographie de Francis Ponge (1899-1988). L’auteur, qui a reçu une formation en philosophie, s’est tourné, après deux échecs académiques, vers la poésie. Il écrit dès ses 20 ans dans des revues sans que cela ne lui permette d’en vivre. Ponge occupe, dès lors, des emplois alimentaires, et durant ses heures libres, il se lie aux poètes surréalistes dans les années 1930 avant d'adhérer au parti communiste en 1937. 

Après la déclaration de la Seconde Guerre mondiale en 1939, Ponge est mobilisé jusqu'à l'armistice de juin 1940. Il entre en 1943 dans la Résistance en devenant agent de liaison.

Parallèlement à la guerre, il poursuit son œuvre poétique ;  il publie en 1942 le Parti pris des choses qui lui apporte un vif succès. Il fait la rencontre de Camus. Comme lui, il s’éloigne du parti communiste. 

Ponge publie la Rage de l'expression en 1952 : il s'agit d'un recueil de textes écrits entre 1938 et 1944.

Il donne des conférences, enseigne aux Etats-Unis : il est un auteur reconnu ; il meurt en 1988.

Le titre du recueil

En 1942, Ponge obtient de faire publier, après bien des péripéties, son recueil composé de pièces écrites avant la guerre, le Parti pris des choses : ce titre renvoie à l’examen d’objets humbles du quotidien (bougie, cageot, cigarette) au travers de textes travaillés pour montrer à la fois la singularité de la chose en elle-même et la vision variable de l’homme sur ce même objet.

En d’autres mots, on peut dire qu’il a adopté le parti pris de décrire des choses. 

Avec cette terminologie, Ponge ne parle finalement pas de l’objet, mais d’abord de lui-même. Notons la difficulté de Ponge à se qualifier de « poète » comme nous le verrons dans l’analyse de l’œillet.  

S’il s’agit de lui, c’est pour évoquer essentiellement son travail et la direction qu’il entend lui donner : un engagement objectif avec une cause à soutenir.

Il se situe au niveau de la matière et non de l’esprit ou des sentiments. Il reprend ce positionnement philosophique et poétique dans son deuxième recueil lorsqu’en 1952, Ponge publie la Rage de l’expression. 

Ce titre comporte de surcroît une tonalité plus violente comme le suggèrent l’étymologie et l’analyse des mots.


Étymologie et analyse

Ce mot provient du latin « rabies » pour évoquer le virus rabique donnant la « rage » ; cette maladie contagieuse transmise par le chien notamment à l’homme est restée longtemps inguérissable (NB : vaccin contre la rage par Pasteur mis au point en 1885). Elle entraînait des manifestations physiques effrayantes : agitation, confusion, hallucination, coma et mort.

Par extension, la rage est devenue au sens figuré une colère violente, une fureur, une frénésie donnant lieu à des actes excessifs. 

On emploie enfin ce terme pour signifier une envie, un désir que rien ni personne ne peut arrêter : ex : la rage de vivre. On est dans le domaine subjectif.


Analysons maintenant la nature et la fonction des termes  : 

- la rage et l’expression : deux noms communs, 

- de : une préposition.


Dans ce groupe nominal, la rage de l’expression, il ne s’agit pas de n’importe quelle rage, puisque ce terme est complété par le complément du nom de l’expression. 

Qu’est-ce qu’on peut déduire ? Une originalité reposant sur deux points.


Objet

L’originalité du recueil repose comme dans le précédent sur l’auteur et sur le monde, avec deux orientations plus précises :

  • l’attitude de l’auteur plus subjective avec son obsession irrépressible,

  • l’objet de sa création est déplacé de la chose au travail de la langue.


On obtient le rapport entre l’auteur et la langue française. Ce sont donc les deux axes centraux de ce recueil dont nous verrons en détail le contenu.

Sources

Madeline Pampel, Francis Ponge et Eugène de Kermadec, chapitre 5 : Ponge et la Seconde Guerre mondiale.

dictionnaire Larousse 

La composition du recueil

Précisons le contexte de l’écriture de ce recueil, si vous le voulez bien.


Contexte

Ayant tenu durant la période 1938 et 1944 un carnet de poèmes, Ponge les réunit dans le recueil, la Rage de l'expression, publié en 1952. 

Comme beaucoup d’auteurs d’autrefois, le poème est d’abord proposé à la publication dans des revues avant d’être regroupé en un recueil. Le livre n'intervient qu’à la fin du projet littéraire. 

Certains des poèmes, objets de notre étude, ont suivi le même processus, sachant qu’ils ont été publiés dans des revues clandestines durant la guerre.

  • Le Mimosa, Fontaine (mai 1942)

  • Notes pour "La Guêpe”, Domaine français (décembre 1943). 


Composition

Ouvrons le recueil. Nous comptons  7 parties principales  :

  • Berges de la Loire : un bref texte en prose (24 mai 1941)

  • La Guêpe : un long texte en prose, composé en fragments avec ou sans sous-titres (août 1943)

  • Notes prises pour un oiseau : fragments et variations de poèmes en vers (mars-septembre 1938)

  • L’Œillet : un long texte en prose, composé en fragments avec des numérotations et des variations poétiques, (1941-1944)

  •  Le Mimosa : un long texte en prose, composé de fragments datés, comprenant des notes et des variations poétiques ( 1941)

  •  Le Carnet du Bois de pins : un carnet de bord comprenant un schéma, des textes en prose datés, des variations poétiques, des suites de chiffres, des notes, de la correspondance (22 juillet 1941) et 5 sous-parties :

    • leur assemblée,

    • le plaisir des bois de pins,

    • formation d’un abcès poétique,

    • tout cela n’est pas sérieux,

    • Appendice 

  •  la Mounine ou note après coup sur un ciel de Provence : un carnet de bord, avec des variations poétiques, des notes. (mai-août 1941)

Pour appréhender l’objectif de Ponge, il convient de relever, tout d’abord, l’unité de composition avant de voir ses différences.


Unité 

On note une unité dans le fait que l’auteur ait choisi comme cadre la nature comprise comme flore et faune : on décompte cependant plus de poèmes consacrés au règne végétal qu'au règne animal.

Ensuite, on retrouve chaque fois le caractère hybride du recueil avec de la prose et des vers : on voit là encore plus de textes en prose qu'en vers. Nous verrons plus loin la raison de cela.

Mais ce qui frappe le plus, c’est l’insertion dans le champ poétique de notes préparatoires, de carnets de bord, de définitions, de poèmes écrits et réécrits. Tout cela figure comme des esquisses jamais achevées.

Voyons les différences, si vous le voulez bien.


Différences

Si la présentation des textes n’est pas classée de manière chronologique, elle ne doit rien au hasard : on décèle, en effet, une progression poétique.

De quelle nature ?

La progression se mesure par la longueur croissante des parties.

Ces dernières sont enrichies de matériaux préparatoires, eux-mêmes plus nombreux et de nature plus variée (correspondance, schéma, suites de nombres, notes).

Les fragments et autres carnets se voient ajouter eux-mêmes des annexes (Le Carnet du Bois de pins et la Mounine ou note après coup sur un ciel de Provence). 

On se trouve dans l’atelier du poète avec l’intégralité de sa documentation et des essais.

La démarche de Ponge

Demandons-nous la nature de l’objectif poursuivi par Ponge qui passe par une démarche scientifique, un réel projet littéraire sans égard pour son propre statut de poète.


Démarche

On a vu dans un précédent article que le titre du recueil, “la Rage”, mettait en lumière l’obsession irrépressible de Ponge pour la langue. 

Il accorde une importance majeure à l’écriture qu’il braque sur le monde (bois, guêpe, mimosas, etc…). 

Il ne veut pas “faire un poème” (Berge de la Loire), il veut “rendre compte d’une chose” (Berge de la Loire). 

Ponge entend ainsi décloisonner l’univers poétique, souvent relié à des aspirations jugées lointaines, du monde réel. On assiste à un mouvement descendant de l’auteur qui s'empare exclusivement du monde d’ici-bas pour en faire un sujet poétique. 

Cette volonté repose sur une fureur du mot : il le dit expressément :

“Quant à moi, le moindre soupçon de ronron poétique m'avertit  seulement que je rentre dans le manège, et provoque mon coup de reins pour en sortir.”(Berge de la Loire).

On est loin de l’image du poète avec sa lyre se promenant en déclamant ses vers…


Ponge devient alors le poète “des choses”, dans une intention délibérément matérialiste. Il adopte une méthode pleine de rigueur, fondée sur une démarche scientifique que l’on peut voir ainsi : 

- il observe la nature qui l’entoure,

- il définit et redéfinit les termes,

- il prend des notes, ébauche des sujets, fait des essais, 

- il reprend ses expériences pour les travailler à nouveau sous un autre aspect

On mesure l’importance de ce cheminement intellectuel chez Ponge, ce qui en fait une entreprise poétique singulière.


Entreprise poétique

L’originalité de cette œuvre repose sur la nature des poèmes et sur le caractère inabouti de l’entreprise créatrice.

Sur le premier point, on a mis en évidence l’aspect hétéroclite du recueil : pour Ponge, le travail de recherche entre dans l’expression langagière qu’elle soit vue comme poétique ou non par les autres. Il dit ainsi :

“Est-ce de la poésie? Je n'en sais rien, et peu importe. Pour moi c'est un besoin, un engagement, une colère, une affaire d'amour-propre et voilà tout.”  (L’Œillet p.47 Folio Lycée)

On comprend le sens de la “rage” qui l’anime.

L’originalité concerne aussi le deuxième point : le sujet de son écriture n’est jamais clos. Ponge explore alors différents modes d’expression dans une quête d’exactitude toujours à recommencer.

Ainsi on observe dans son recueil des renvois à des précisions à apporter :


“Somme toute il reste encore :

1.les bandes épars indisciplinés,

2. l'oiseau comme robinet de bois qui grince et crisse, pépie, piaille…”

(Notes prises pour un oiseau (p.45 Folio Lycée)


Il note aussi à la toute fin de son recueil :

“Un jour, dans quelques mois ou quelques années, cette vérité aux profondeurs de notre esprit étant devenue habituelle, évidente peut-être, à l’occasion de la relecture des pages malhabiles et efforcées qui précèdent ou bien à l’occasion d’une nouvelle contemplation d’un ciel de Provence.” (la Mounine ou note après coup sur un ciel de Provence p.141 Folio Lycée).

Son travail de la langue se conçoit comme un chantier jamais achevé.

Tout reste ouvert sur une autre interprétation.

Il fait donc entrer la poésie dans une perspective de perméabilité au monde. 

L'inventaire de l'atelier

Objets

Il est temps de faire l'inventaire de l’atelier de Francis Ponge. Que trouve-t-on de si singulier  ?

Comme un peintre, le poète se consacre aux choses (mimosa, œillet). Elles constituent l’objet même de son travail qui n’est pas figé : il implique un rapport intérieur/extérieur, car cet atelier n’est pas un lieu clos.

Comme un impressionniste, il crée en effet, en plein air (forêt, berges de la  Loire, oiseaux) au contact direct avec le réel. 

En dehors des choses croquées, on trouve aussi un dictionnaire, mais pas n'importe lequel, le Littré. C’est en fait une véritable encyclopédie qui comporte un volet étymologique, grammatical et historique outre de nombreuses citations littéraires. Cette dimension multiple ne pouvait qu’accompagner Ponge dans son entreprise. Mais l’œuvre, en elle-même, peut être considérée comme un objet d’art.


Recueil

Le recueil  peut figurer comme un tableau, une œuvre d'art.

Ponge lui-même établit ce rapprochement, il dit expressément :

« Mais, si je m’ausculte un peu plus attentivement : ce n'est pas seulement de lecture que je me trouve avoir envie ou besoin; aussi de peinture aussi de musique (moins). Il me faut donc écrire de façon à satisfaire ce complexe de besoins. » (le Carnet du bois de pins, 6 août 1940 page 107). Il fait référence notamment à Vinci (page 139).

La singularité tient à la forme de cette composition : il s'agit d'un journal poétique avec des écrits épars, qui sont autant d'expressions jamais achevées. 

Intéressons-nous désormais au contenu du recueil.

On a dans un premier temps montré sa progression : on a considéré que l’œuvre devient de plus en plus compacte, avec la correspondance et les appendices.

Regardons maintenant les pages, comme la toile du maître.

Que constate-t-on ?


a) typographie

Ponge se soucie de la typographie, on décèle dans le texte un arrangement précis, rigoureux, s’apparentant aux traits du peintre. On a ainsi des titres en lettres capitales : « NOUVELLES NOTES POUR MON OISEAU » (p.44).


D'autres sont en italique « Balle de fusil » (p.32). 


Ponge insère également des mots en italique ou en lettres capitales dans le corps du poème (cf. La Guêpe, dernier paragraphe, p.33). 


On a vu que Ponge a choisi une forme éclatée : concrètement, on relève que les fragments sont donc séparés par un astérisque lorsqu'il n'y a pas de titre ou de date. Ainsi, on peut lire : 

*

 Un barbare essaim parcours la campagne le jardin en est parcouru. ( La Guêpe page 32)

 * 


b) ponctuation

Le texte de Ponge est ultra ponctué : points d’exclamation, d'interrogation, de suspension, tirets, etc. Il s’agit de rendre compte de la réflexion prise sur le vif, du rapport direct entre ce qui est pensé et écrit : il n’y a pas de filtre.

Le poète nous donne à voir l’élaboration de sa pensée  : colorions en bleu la ponctuation pour nous en rendre pleinement compte :

"Non !
 Décidément,  il faut que je revienne au plaisir du bois de pins.
 De quoi est-il fait,  ce plaisir ? - Principalement de ceci : le bois de pins est une pièce de la nature, faite d'arbres tous d'une espèce nettement définie ; pièce bien délimitée, généralement assez déserte, où l'on trouve abri contre le soleil, contre le vent, contre la visibilité ; mais abri non absolu, non pas isolement. Non ! C'est un abri relatif, un abri non cachotier, un abri non mesquin, un abri noble."(Carnet du bois de pins p. 77)

c) le lexique

Sur le fond, Ponge travaille les mots :  il crée des combinaisons souvent à des fins caustiques faites des rapprochements de termes.

Il invente un néologisme : "l'objeu", contraction de l'objet et du jeu. Il manipule le langage avec rigueur et créativité. 

Dans son recueil, on peut souligner des éléments que l'on peut qualifier de "traditionnels" :  on met entre parenthèses ce terme, puisque Ponge ne relève pas à proprement parler du classicisme.


"Tradition"

Ponge est un poète qui s'oblige à une rigueur expressive :  il respecte ainsi la ponctuation, à la différence de bon nombre de surréalistes. 

On peut insister, en outre,  sur l'intertextualité,  c'est-à-dire sur les références implicites à des auteurs précédents : La Fontaine notamment avec le recours à la prosopopée destinée en l'occurrence à faire parler un animal (cf. la Guêpe). 

Mais il cite  explicitement ce moraliste avec l’étude de ses fables :

"le Lion et le Rat, le Roi vieilli, Les animaux malades de la peste etc." ( La Mounine ou note après coup sur un ciel de Provence p.134).

Loin de s’arrêter à ce seul auteur du XVIIe siècle, il évoque aussi d’Aubigné (p.69), Théophraste et ses caractères, auteur de l'Antiquité.

On voit aussi des références à Rimbaud avec son sonnet intitulé "Voyelles":

"le mot oiseau (...) contient toutes les voyelles" ( notes prises pour un oiseau p. 34).

Le schéma figurant dans la 6e partie rappelle Apollinaire et ses calligrammes.

Ponge s'exprime le plus souvent au présent en conférant à ce temps une valeur à la fois d’énonciation d'un discours en cours d'élaboration et également de vérité générale :

"Les choses et les poèmes sont inconciliables”  (Berges de la Loire p. 24).

La portée du recueil

Ponge renouvelle la poésie en lui accordant un nouvel espace de liberté, débarrassé des contraintes traditionnelles : thématiques "classiques" sur la souffrance, sur l'amour, la mort, sur la nature éthérée, etc. 

Sa vision du monde est ramenée au réel, dans une démarche purement matérialiste. 

Il s'inscrit pleinement dans la lignée des Lumières (XVIIIe siècle) avec cette lutte contre l'obscurantisme religieux et dans une démarche encyclopédique.

Il s'oppose ainsi à toute dimension spiritualiste, comme on peut le voir à de nombreuses reprises dans le texte avec notamment la mention de “M.Dieu” (p.132). 

“C'est en ce sens que je me prétends combattant dans les rangs du parti des Lumières comme on disait au Grand Siècle ( le  XVIIIe siècle).  il s'agit, une fois de plus, de cueillir le fruit défendu non déplaise aux puissances d'ombre, à Dieu l'ignoble en particulier.” ( le Carnet du bois de pins p. 115)

Absurde

Il suit Camus dans sa philosophie de l'absurde. L'homme est ainsi projeté dans le monde  sans que son existence n’ait d'autre terme que sa propre mort. Cette prise de conscience de l’absurdité de la vie le mène à une révolte. Cette dernière débouche sur un nouveau sens à rechercher, fondé sur un engagement dans les affaires d’ici-bas pour rendre celui-ci moins intenable. Un tel engagement de l'homme lui donne sa vraie dignité. 


Poésie engagée

La poésie de Ponge s'inscrit dans cette philosophie qui revêt pleinement un aspect politique :

” il s'agit de militer activement (modestement mais efficacement) pour les lumières et contre l'obscurantisme- cet obscurantisme qui risque à nouveau de nous submerger au 20e siècle du fait du retour à la barbarie voulue par la bourgeoisie comme le seul moyen de sauver ses privilèges” ( 19 juillet 1941, la Mounine ou note après un coup sur un ciel de Provence  p. 132)

Son œuvre entre dans ce que l'on appelle de la poésie engagée, née à la suite de la Première Guerre mondiale. Ponge s’inscrit dans les pas d’autres auteurs (Eluard, Aragon…).


La poésie joue la fonction d’éveilleuse de conscience :  elle incite à lutter contre les injustices.  

La Rage de l'expression publié en 1952 renvoie à une période précise, au contexte compris entre  1937 et 1944, soit de la menace de guerre à l'occupation allemande.

Il s'agit pour le poète de faire l'apologie de l'action, comme on peut le verra avec La guêpe. L’évocation de la résistance n'est pas loin quand il convoque “l’essaim” qui a plus de poids que la piqûre seule de l’insecte. Il prône le collectif sur l'individualisme : rappelons l’influence marxiste sur sa pensée.


Morale

Si “La Rage de l'expression” s'oppose à l'esthétique traditionnelle de la poésie, ce recueil n'est pas dénué de valeurs morales, au contraire. Sa poésie est toute tournée vers l'homme, vers son bonheur par la meilleure connaissance du monde qui l'entoure. 

Elle revêt un registre didactique, offrant les étendues infinies des ressources rendues possibles par l’observation humaine. C'est une œuvre profondément humaniste et donc classique de ce point de vue :  il s'agit d'une poésie pour l'homme,  pour sa perfection. 

Le rôle de l’auteur consiste à être l'intermédiaire entre le monde et l'homme par le biais de son regard et de son écriture.

La réconciliation entre eux est source de bonheur.

Nous entrerons dans le prochain article dans l’analyse linéaire d’un extrait du recueil.

 

repère à suivre : analyse linéaire de la guêpe 

 


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