Analyse-Livres & Culture pour tous
20 Avril 2013
Repères : le thème du mariage : l'étude
Le vieillard a indiqué à l'appui de son argumentation sur le mariage qu'il a tué son épouse. Il poursuit la conversation avec le narrateur. La confession débute.
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Une union malheureuse
Le mariage entre Pozdnychev et sa femme sombre très rapidement dans l'ennui. Les disputes entre les époux vont devenir légion. Notre héros découvre au fil des jours l'étendue de son malheur :
« Bientôt cette haine réciproque se dissimula de nouveau dans les caprices de notre volupté, et je me consolai en me disant que ces querelles étaient des malentendus réparables.
Une troisième, une quatrième survinrent ; je dus bien reconnaître que ce n’était pas un simple malentendu, mais une situation fatale, permanente, et j’en fus horrifié. Je me demandai pourquoi j’avais, moi, et non pas tout autre, une existence à ce point déplorable avec ma femme. » (page 63)
Les relations intimes
Dans cette union, les relations intimes sont ramenées à des actes contre-nature et vils (page 54). Pozdnychev estime que la procréation éloigne l'homme de sa source de jouissance en suscitant sa jalousie. Il a ainsi vu sa femme se consacrer aux soins des enfants et le délaisser.
A ce stade du roman, le vieillard n'a pas de mots assez durs pour rejeter toute forme de sexualité. La jouissance lui semble abjecte, la volupté odieuse (page 70). Il émet -a posteriori- des considérations générales visant à établir que la passion charnelle empêche l'humanité d'accéder à sa parfaite réalisation. Pozdnychev en arrive à prôner purement et simplement l'abstinence et la pureté.
Mais quel est donc l'évènement qui l'a conduit à reconsidérer sa vie sous cet angle radical ? Une sonate de Beethoven.
La sonate de Kreutzer de Beethoven.
Une circonstance particulière précipite ce ménage malheureux vers la tragédie. Leur arrivée en ville conduit l'épouse à changer radicalement. Elle redevient femme et non plus seulement mère. L'épouse attise le désir des hommes. Cette nouvelle attitude suscite la jalousie de son époux dont les sens sont à nouveau en éveil. Intervient à ce moment la sonate de Kreutzer de Beethoven qui va être le point de départ de la tragédie.
Un concert se tient chez les Pozdnychev et l'épouse désireuse de briller en société exécute la fameuse sonate au piano accompagné par un violoniste avec lequel elle a répété. Vous pouvez écouter le premier mouvement :
Ce concert est une réussite car l'événement prendra tout son relief a posteriori lorsque Pozdnychev dont la jalousie est attisée se remémore alors le « morceau sensuel jusqu’à la lubricité. » (page 127).
C'est encore cette sensualité qui fait surgir sa pulsion meurtrière. Seul le regret de l'acte irréparable qu'il a commis le conduira à penser que tout cela ne serait jamais arrivé s'il ne s'était pas... marié.
Le mariage peut aussi être source de félicité ainsi que nous le découvrirons dans le prochain livre, Lettre à Laurence de Jacques Bourbon-Busset.
Repères à suivre : l'étude : Le témoignage d'un amour partagé (Bourbon-Busset)