10 Juin 2010
Nous verrons la figure du père effrayant pour ses enfants dans l'extrait des Mémoires d'outre-tombe de Chateaubriand.
Repères : thème du père : présentation
Nous poursuivons notre présentation du père dans la littérature. C'est l'occasion de mettre en relief différentes figures du père, selon une gradation passant du "bon" père au père tyrannique selon l'ordre suivant :
Nous avons lu un extrait du Petit Chose de Daudet, nous verrons aujourd'hui la figure suivante, si vous le voulez bien, celle du père effrayant pour ses enfants au travers de l'extrait des Mémoires d'outre-tombe de Chateaubriand.
Le souvenir d'un père autoritaire et froid peut laisser une impression douloureuse à un enfant terrifié. Une marque indélébile pour la vie.
Prenons Chateaubriand qui a fait la rude expérience d'une relation au père dénuée de chaleur humaine.
Relisons la description d'une étrange soirée familiale auprès du feu.
Mais l'auteur finira par rendre justice à la rigueur paternelle.
« Les soirées d’automne et d’hiver étaient d’une autre nature. Le souper fini et les quatre convives revenus de la table à la cheminée, ma mère se jetait, en soupirant, sur un vieux lit de jour de siamoise flambée ; on mettait devant elle un guéridon avec une bougie. Je m’asseyais auprès du feu avec Lucile ; les domestiques enlevaient le couvert et se retiraient. Mon père commençait alors une promenade, qui ne cessait qu’à l’heure de son coucher. Il était vêtu d’une robe de ratine blanche, ou plutôt d’une espèce de manteau que je n’ai vu qu’à lui. Sa tête, demi-chauve, était couverte d’un grand bonnet blanc qui se tenait tout droit. Lorsqu’en se promenant, il s’éloignait du foyer, la vaste salle était si peu éclairée par une seule bougie qu’on ne le voyait plus ; on l’entendait seulement encore marcher dans les ténèbres : puis il revenait lentement vers la lumière et émergeait peu à peu de l’obscurité, comme un specte, avec sa robe blanche, son bonnet blanc, sa figure longue et pâle. Lucile et moi, nous échangions quelques mots à voix basse, quand il était à l’autre bout de la salle ; nous nous taisions quand il se rapprochait de nous. Il nous disait, en passant : « De quoi parliez-vous ? » Saisis de terreur, nous ne répondions rien ; il continuait sa marche le reste de la soirée, l’oreille n’était plus frappée que du bruit mesuré de ses pas, des soupirs de ma mère et du murmure du vent. »
Les Mémoires d'Outre-Tombe, Chateaubriand, wikisource
http://fr.wikisource.org/wiki/M%C3%A9moires_d%E2%80%99outre-tombe/Premi%C3%A8re_partie/Livre_III
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« Je pleurai M. de Chateaubriand : sa mort me montra mieux ce qu'il valait ; je ne me souvins ni de ses rigueurs ni de ses faiblesses. Je croyais encore le voir se promener le soir dans la salle de Combourg ; je m'attendrissais à la pensée de ces scènes de famille. Si l'affection de mon père pour moi se ressentait de la sévérité du caractère, au fond elle n'en était pas moins vive.(...)"
Les Mémoires d'Outre-Tombe, Chateaubriand, wikisource
http://fr.wikisource.org/wiki/M%C3%A9moires_d%E2%80%99outre-tombe/Premi%C3%A8re_partie/Livre_IV
repère à suivre : le père abusif