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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

Promenades littéraires avec Jane Austen

Promenades littéraires avec Jane Austen

(Jane Austen)

 

 

Repères : Tour d'Angleterre : Somerset


Portrait de Jane Austen

Dans les prochains articles, il vous sera proposé de découvrir la région du Somerset avec Jane Austen, auteur du 18ème siècle à l'audience confidentielle avant sa redécouverte au milieu du XXème siècle. Nous ferons avec cette dernière un petit bout de chemin.

Nous choisirons pour ce faire l'œuvre la plus connue : Pride and Préjudice (Orgueil et Préjugés) en nous déplaçant dans le Hertfordshire, puis dans le Derbyshire (au nord de Londres). 

 

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***

Analyse critique de l'œuvre

Avant de débuter notre parcours, il est intéressant de découvrir Jane Austen et l'originalité de son œuvre sous la plume d'un critique français :

 

Un auteur peu connu de son vivant

"Jane Austen est née en 1775 à Stevenson, près de Basington, en Angleterre. (...) Sa vie s’est passée tout entière à la campagne ou dans des villes de province. Elle n’est qu’occasionnellement venue à Londres. Elle ne s’est pas mariée. On ne lui connaît ni passion, ni engagement d’amour. Elle n’a laissé aucune action à raconter. Elle existe par les romans qu’elle a écrits : Pride and Prejudice, Northanger Abbey (dont La revue blanche publiera prochainement une traduction sous le titre de Catherine Morland), Sense and Sensibility, Mansfield Park, Emma

Le premier, Pride and Prejudice, présenté en 1798, à l’éditeur Crabe fut dédaigneusement refusé. Le second, Northanger Abbey, vendu d’abord à un éditeur de Bath, pour la somme de dix livres sterling, fut ensuite retourné. L’éditeur à la réflexion, s’estima heureux de recouvrer son argent. Enfin les éditeurs Egerton et Murray, à Londres, consentent à publier ses romans, qui paraissent anonymement.

Quand Miss Austen meurt en 1817, à quarante-deux ans, son nom commençait à être connu. (...)

Miss Austen s’est développée spontanément, sur elle-même. Elle est devenue auteur d’une façon d’abord inconsciente, pour obéir à l’appel de facultés natives. Elle a écrit pour se satisfaire, sans préoccupation première de gloire, de fascination à exercer sur le public, sans s’inquiéter des jugements qui seraient portés sur son œuvre, par des critiques, des confrères ou la multitude.(...)

Miss Austen, par la singularité de sa survenue à la campagne, dans un milieu étranger à tout souci littéraire, donne, dans sa plénitude, l’exemple d’un art développé tout entier sur lui-même, puisant dans le fond de son auteur ses éléments d’existence. C’est pourquoi elle a eu d’abord si peu de succès, ne s’inquiétant point de s’adapter an goût du moment, et pourquoi elle a ensuite sans cesse grandi et est devenue souveraine. Elle possédait l’existence propre, l’originalité dominatrice ; elle a ainsi échappé, ce qui est une condition d’avenir, aux passions fugitives et à l’influence des coteries ou des cénacles."

Un tableau représentatif de la vie anglaise

"Miss Austen n’introduit point d’élément romanesque dans ses romans. Elle ne connaît pas les traits extraordinaires. Elle ne cherche pas les cas d’exception. Elle n’a nullement besoin de l’épisode rare, de l’aventure étrange. Elle n’a vu la vie que sous l’aspect réel où elle se présentait autour d’elle. Elle l’a prise pour la peindre dans l’exacte proportion de son développement de tous les instants. Ses personnages ont été de cet ordre qui embrassait sa famille, son entourage, le milieu où elle vivait. Elle les a montrés tels qu’ils existaient, sans les déformer pour les agrandir, ou leur donner des puissances, à part des traits ordinaires qui composaient leur nature.

Quand on lit un de ses romans, on voit les gens vaquer aux soins et aux plaisirs qu’entraîne leur condition, Ils vont et viennent, se visitent, dînent ensemble, prennent le thé, en causant et en échangeant les idées convenables. Puis se montrent, dans la juste mesure ou elles entrent aussi dans la vie réelle, les jalousies, les rivalités, les brouilles, les réconciliations ; puis les gens se prennent, flirtent, se marient, se quittent, tels qu’ils le font dans le train de chaque jour. Le paysage, les lieux, les logis, jusqu’aux ameublements, sont décrits, dans leur exacte proportion, de manière à ce que chaque être soit dans son cadre et ses entours.

On pourrait croire que ce procédé d’observation si minutieux donnera la peinture d’un monde représenté par ses moindres côtés et dépourvu de caractère. Mais l’observation du fait vivant, tel qu’il se produit dans ses multiples manifestations, est si subtile, si complète, si pénétrante qu’inconsciemment la trame de l’œuvre dégage une vie supérieure, qui laisse voir, en plein épanouissement, le peuple et le pays dans leur ensemble. Quoique les héros et les héroïnes — si ces mots sont permis — soient surtout de la classe moyenne, ils comprennent assez de membres de l’aristocratie et admettent accessoirement assez de gens du peuple, pour que le tableau de la vie anglaise soit complet. Les relations des classes entre elles, la manière dont se comportent vis-à-vis les uns des autres les hommes de tout âge et de toute condition, les idées, les préjugés, les opinions spéciales des professions et des rangs, s’y trouvent dans leur entier. Et en lisant Miss Auslen, on connaît l’Angleterre telle qu’elle était au commencement de ce siècle. (...)

L’observation de la vie, telle que la pratique Miss Austen, offre un art qui se tient forcément dans les limites contenues et entraîne des restrictions et, en effet, tout le côté des passions exceptionnelles n’est point à chercher dans son œuvre. Elle ne s’élève donc jamais au grand drame, à l’amour délirant, à la furie déchaînée, et, à l’autre extrémité de l’échelle, son observation minutieuse l’amène à la contemplation de manières d’être tellement communes, qu’on pourrait craindre de la voir tomber, à certains moments, dans la platitude et la trivialité. Cependant elle n’y tombe point. Elle s’en sauve, même dans ces cas où le sujet et le motif observés sont réellement terre-à-terre, par l’art et la valeur du style. Elle triomphe au contraire dans le rendu de ces minuties et de ces riens de la vie, qui complètent les peintures, donnent leurs derniers traits aux caractères, que les autres seul obligés d’abandonner comme trop ténus, mais qu’elle, avec sa légèreté féminine, sait saisir, pour leur prêter un charme qui les rend attachants. Ce sont alors surtout les qualités de forme et de style qui relèvent le sujet, et Miss Austen possède en effet de ces qualités de forme et de style, qui n’appartiennent qu’aux écrivains de premier rang.

Elle écrit avec cette félicité d’expression, ce charme naturel qui sont les dons montrés par les femmes, lorsqu’elles ont du génie ou du talent. Sa plume est en même temps pénétrée de l’humour anglais, qui donne la marque du caractère national. L’humour chez elle est contenu ; il n’atteint point cette violence qui verse dans la satire, le sarcasme amer ou la caricature. Ainsi tempéré par le tact féminin, il fait que le style demeure limpide, alerte, dans la mesure de ce sentiment artistique qui évite les dissertations, la rhétorique, la lourdeur et le pédantisme."

Parallèle Austen/Shakespeare

"Elle possède, comme qualité de forme, quelque chose peut-être encore plus rare que les dons purs du style. Elle sait douer chaque personnage qu’elle fait parler, d’une langue propre, d’une manière de s’exprimer personnelle. On l’a, sur ce point, comparée à Shakespeare, dont elle s’approche, en effet. Aussitôt que le personnage que Shakespeare met en scène a prononcé quelques phrases, elles sont de telle structure, que l’homme tout entier se montre et que les particularités du langage révèlent le fond même de l’être. Miss Austen donne elle aussi à chacun de ses personnages, une langue et une manière de s’exprimer correspondant à son caractère et servant tout de suite à le révéler. (...)

Le roman, choisi comme forme d’art pour fixer les aspects réels de la vie, a eu son complet développement dans ce siècle. Il a pris des formes multiples, s’est prêté et assoupli à des usages divers, a été employé par des peuples différents, qui lui ont donné chacun leur caractère national. On pourrait presque, comme on le fait pour la peinture, le différencier en écoles et on distinguerait alors les écoles anglaise, française et russe. L’école anglaise apparaîtrait la première en date. À l’époque où, en France, on cultivait encore la tragédie classique, comme forme littéraire supérieure, et où l’imagination se renouvelant n’avait produit que les œuvres romantiques de Rousseau et de Chateaubriand, l’Angleterre avait déjà donné, dans le domaine de l’observation exacte de la vie, les romans de Fielding et de Miss Austen."

Théodore Duret

 

http://fr.wikisource.org/wiki/Miss_Austen

 

repères à suivre : Jane Austen à Bath

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F
<br /> Ah, ces romancières anglaises! Quel talent, quel force! C'est sans doute le seul pays dont autant de femmes ont franchi la barrière masculine vers l'écriture...<br />
Répondre
L
<br /> <br /> Elles ont eu un tour d'avance sur nous...<br /> <br /> <br /> <br />