20 Octobre 2010
Moderato Cantabile de Marguerite Duras voient deux partitions en cours d'exécution au-delà de la réalité des évènements et du contenu des paroles échangées. Les mots employés par les protagonistes forment une musique qu'il ne faut pas rompre par le silence.
Repères : thème de la musique : l'étude
Il a été précédemment évoqué que le dialogue des deux protagonistes du livre de Marguerite Duras, Moderato Cantabile, pouvait sembler difficilement intelligible. .
En réalité, deux partitions musicales s'exécutent au-delà de la réalité des évènements et du contenu des paroles échangées.
Le sens des mots importe finalement peu dans cette relation faite du désir tenu encore à distance par le temps et par le regard des autres :
« Le même émoi la brisa, lui ferma les yeux. La patronne se leva, remua, rinça les verres.
- Dépêchez-vous de parler. Inventez »
Elle fit un effort, parla presque haut dans le café encore désert. » (page 44).
Les mots employés par les protagonistes forment une musique qu'il ne faut pas rompre par le silence. Il faut parler quoiqu'on se dise.
Un rituel du désir s'instaure progressivement entre ces deux personnages : « La patronne, qui tricotait sa laine rouge derrière le comptoir, remarqua qu'ils ne s'abordèrent que longtemps après qu'elle fut rentrée et que leur apparente ignorance l'un de l'autre se prolongea plus que la veille encore. » (page 38)
L'attraction de l'un envers l'autre se fait jour au point de faire entrer, dans la vie de cette femme, un réveil de tout son être. L'homme lui lance un appel. Il le formule en lui demandant de partir.
Au cours d'un dîner donné chez elle, elle sent la présence de Chauvin dans la rue. Elle prend conscience de son désir pour lui au travers de ses sens, notamment le goût (le vin) et l'odorat (les magnolias) dans un chapitre d'une beauté incomparable (chapitre VII) qui nous livre enfin de menues informations sur la vie de l'héroïne, dans une éternelle économie de mots.
La tension durant ce dîner est poussée à son paroxysme. Mais Anne Desbaresdes résiste à son désir. Le dîner achevé, son mari se détourne d'elle. Malade au sens propre comme au sens figuré, elle est seule :
« L'homme a lâché les grilles du parc. Il regarde ses mains vides et déformées par l'effort. Il lui a poussé, au bout des bras, un destin.» (page 74).
Repères à suivre : l'étude : Moderato Cantabile, deux partitions en cours d'exécution (4)