Analyse-Livres & Culture pour tous
19 Juillet 2010
Le tour de France littéraire nous conduit dans le Puy de dôme, pays natal de Pascal, qui est à la fois un savant physicien et un grand philosophe français du XVIIe siècle. Il est connu pour une expérience scientifique capitale : la remise en question de la théorie aristotélicienne sur le fait que la nature a horreur du vide. Sur les hauteurs du Puy de dôme, il a mis évidence l'exact contraire...
Repères: Tour de France: Pascal et le Puy de Dôme
Dans l'article précédent, nous étions dans les Alpes avec Monsieur Perrichon, aujourd'hui, nous découvrons un autre espace, celui du massif central.
Dans le cadre de nos vacances, si nous mettions le temps libre à profit pour réaliser quelque chose d'insolite ?
Que diriez-vous d'une expérience en sciences physiques à réaliser en altitude ? Vous avez bien lu !
Prenons au hasard le Puy de Dôme ...
Relisons l'invitation pressante faite par Blaise Pascal à Monsieur Périer en 1647 de venir réaliser l'expérience de l'équilibre des liquides qui donnera lieu à la publication un an plus tard du Récit de la grande expérience de l'équilibre des liqueurs (1648).
Dans les passages choisis, Pascal démonte la théorie aristotélicienne qui considère que la nature a horreur du vide. Sur les hauteurs du Puy de dôme, il a mis évidence l'exact contraire...
"Je n'interromprais pas le travail continuel où vos emplois vous engagent pour vous entretenir de méditations physiques, si je ne savais qu'elles serviront, à vous délasser en vos heures de relâche, et qu'au lieu que d'autres en seraient embarrassés, vous en aurez du divertissement. J'en fais d'autant moins de difficulté, que je sais le plaisir que vous recevez en cette sorte d’entretien.
Celui-ci ne sera qu'une continuation de ceux que nous avons eus ensemble touchant le vide. Vous savez quel sentiment les philosophes ont eu sur ce sujet: tous ont tenu pour maxime, que la nature abhorre le vide; et presque tous, passant plus avant, ont soutenu qu'elle ne peut l'admettre, et qu'elle se détruirait elle-même plutôt que de le souffrir. Ainsi les opinions ont été divisées: les uns se sont contentés de dire qu'elle l'abhorrait seulement, les autres ont maintenu qu'elle ne le pouvait souffrir. J'ai travaillé dans mon Abrégé du traité du vide à détruire cette dernière opinion et je crois que les expériences que j'y ai rapportées suffisent pour faire voir manifestement que la nature peut souffrir et souffre en effet un espace, si grand que l'on voudra, vide de toutes les matières qui sont en notre connaissance et qui tombent sous nos sens. Je travaille maintenant à examiner la vérité de la première, et à chercher les expériences qui fassent voir si les effets que l'on attribue à l'horreur du vide, doivent être véritablement attribués à cette horreur du vide, ou s'ils le doivent être à la pesanteur et pression de l'air; (…)
J'en ai imaginé une qui pourra seule suffire pour nous donner la lumière que nous cherchons, si elle peut être exécutée avec justesse. (...)
Mais comme la difficulté se trouve d'ordinaire jointe aux grandes choses, j'en vois beaucoup dans l'exécution de ce dessein, puisqu'il faut pour cela choisir une montagne excessivement haute, proche d'une ville dans laquelle se trouve une personne capable d'apporter à cette épreuve toute l'exactitude nécessaire. Car si la montagne était éloignée, il serait difficile d'y porter les vaisseaux, le vif-argent, les tuyaux et beaucoup d'autres choses nécessaires, et d'entreprendre ces voyages pénibles autant de fois qu'il le faudrait, pour rencontrer au haut de ces montagnes le temps serein et commode, qui ne s’y voit que peu souvent. Et comme il est aussi rare de trouver des personnes hors de Paris qui aient ces qualités, que des lieux qui aient ces conditions, j'ai beaucoup mon bonheur d'avoir, en cette occasion, rencontré l'un et l'autre, puisque notre ville de Clermont est au pied de la haute montagne du Puy de Dôme, et que j'espère de votre bonté que vous m'accorderez la grâce d’y vouloir faire vous-même cette expérience ;(...)
Je vous prie seulement que ce soit le plus tôt qu'il vous sera possible et d'excuser cette liberté où m'oblige l'impatience que j'ai d’en apprendre le succès sans lequel je ne puis mettre la dernière main au traité que j'ai promis au public, ni satisfaire au désir de tant de personnes qui l'attendent, et qui vous en seront infiniment obligées. Ce n'est pas que je veuille diminuer ma reconnaissance par le nombre de ceux qui la partageront avec moi, puisque je veux, au contraire, prendre part à celle qu'ils vous auront, et en demeurer d'autant plus.
Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur, Pascal,
De Paris, ce 15 novembre 1647 »
Source : http://web.crdp-poitiers.org/manifestations/expo_physique/images/AFFICHE%20Pascal.pdf
repère à suivre : La Franche- Comté et l'incipit d'un livre célèbre