26 Juillet 2012
Repères : carnet de voyage : Egypte
La volonté de fuir
Dans le dernier article, nous avions laissé notre soldat de l'armée française entre les griffes d'une panthère terrible. Le premier contact entre l'animal et la bête se déroule de manière inattendue. Amicale, la panthère chercher à se faire caresser par l'homme qui n'a pour l'heure qu'une seule idée s'enfuir. La bête fauve est en effet douce avec lui car elle s'est rassasiée de la monture du soldat. Mais ce dernier sent que les choses vont tourner à son désavantage s'il ne s'échappe pas...
***
« Vers la fin de la journée, il s’était familiarisé avec sa situation périlleuse, et il en aimait presque les angoisses. Enfin sa compagne avait fini par prendre l’habitude de le regarder quand il criait en voix de fausset : « Mignonne ». Au coucher du soleil, Mignonne fit entendre à plusieurs reprises un cri profond et mélancolique.
— Elle est bien élevée !… pensa le gai soldat ; elle dit ses prières !…
Mais cette plaisanterie mentale ne lui vint en l’esprit que quand il eut remarqué l’attitude pacifique dans laquelle restait sa camarade.
— Va, ma petite blonde, je te laisserai coucher la première, lui dit-il en comptant bien sur l’activité de ses jambes pour s’évader au plus vite quand elle serait endormie, afin d’aller chercher un autre gîte pendant la nuit. Le soldat attendit avec impatience l’heure de sa fuite, et quand elle fut arrivée, il marcha vigoureusement dans la direction du Nil ; mais à peine eut-il fait un quart de lieue dans les sables qu’il entendit la panthère bondissant derrière lui, et jetant par intervalles ce cri de scie, plus effrayant encore que le bruit lourd de ces bonds.
— Allons ! se dit-il, elle m’a pris en amitié !… Cette jeune panthère n’a peut-être encore rencontré personne, il est flatteur d’avoir son premier amour ! En ce moment le Français tomba dans un de ces sables mouvants si redoutables pour les voyageurs, et d’où il est impossible de se sauver. En se sentant pris, il poussa un cri d’alarme, la panthère le saisit avec ses dents par le collet ; et, sautant avec vigueur en arrière, elle le tira du gouffre, comme par magie. -- Ah ! Mignonne, s’écria le soldat, en la caressant avec enthousiasme, c’est entre nous maintenant à la vie à la mort. Mais pas de farces ? Et il revint sur ses pas. » (à suivre)
Une passion dans le désert, Balzac
http://fr.wikisource.org/wiki/Une_passion_dans_le_d%C3%A9sert
Repères à suivre : un
animal apprivoisé...