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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

Le ballon dirigeable (6) : la guerre des tranchées

Retrouvez l'épilogue de la nouvelle de Marie Aragnieux, le ballon dirigeable, librement inspirée du célèbre arrêt Clément Bayard du 3 août 1915. Il a été indiqué qu'en 1908, les habitants de la commune d'Hermine sur Oise voient avec fierté l'implantation d'une usine d'aéronefs par un ancien enfant du pays, Auguste Mayard. Ouvrier ingénieux et intrépide, ce dernier s'est passionné pour la conquête de l'air. Or, un paysan, Victor Raturel, ne partage pas l'engouement général et décide d'acheter en 1910 une parcelle de terre contiguë au fonds des entreprises Mayard. Il y fait élever une étrange palissade en bois surmontée de piquets en fer de trois mètres. Cette clôture provoque une avarie importante sur le Mayard V, totalement détruit, ruinant les efforts entrepris par la France pour la domination des  airs. La Presse s'empare alors de l'affaire. Le Conseil Municipal et le Préfet essayent de faire entendre raison au propriétaire perfide. Mais buté, Victor Raturel considère qu'il a le droit de faire ce que bon lui semble sur son propre terrain. L'affaire est portée devant le tribunal qui condamne le propriétaire à retirer sur son fonds les piquets de bois litigieux. Mais un appel est formé par l'encombrant voisin, ce qui laisse durant le nouvel examen du dossier les choses en l'état : les essais de ballon ne peuvent pas reprendre. Bientôt l'Europe va être secouée par un conflit armé...

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Repères  : thème du Mouvement : le feuilleton

Il y eût moins d'affluence en ce mois d'octobre 1913 dans la salle d'audience de la Cour d'Appel d'Amiens. La distance à parcourir avait rebuté bon nombre de personnes. On comptait sur la Presse pour relater en détail les débats qui continuaient à passionner la commune d'Hermine sur Oise.

Les mêmes protagonistes firent ainsi leur entrée sous les flashes crépitant ; les clichés photographiques les présentaient les yeux aveuglés tant par la lumière que par leur propre obstination. Chacun maintenait ses propres demandes dont le quantum avait considérablement explosé sous le poids de l'inimitié. Les débats furent rapidement clos et l'affaire mise en délibéré. C'est ainsi que la Cour rendit sa décision, en novembre  de la même année, confirmant en tous points celle des premiers juges. En bonne logique, le litige devait enfin se tarir et le récalcitrant n'avait plus qu'à se soumettre à l'arrêt.

Mais c'était sans compter sur la farouche obstination de Victor Raturel qui décida de frapper la décision d'un pourvoi. Il clamait  qu'il n'avait fait qu'user de son bon droit. Son honneur avait été atteint. C'est ainsi que l'entier dossier partit pour son examen long et minutieux à Paris.

Mais durant ce temps, cette affaire avait perdu de sa flamboyance. On était en effet à l'approche d'une guerre qui menaçait de jour en jour. Les essais de dirigeables revêtirent un enjeu moins stratégique comparativement à l'armement lourd que la Nation devait produire en nombre. Des tensions vives montèrent graduellement jusqu'à l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand et de son épouse à Sarajevo le 28 juin 1914. Par le jeu des alliances, la France se jeta comme toute l'Europe dans le terrible brasier à l'issue de l'ordre de mobilisation daté du 1er août 1914. Les hommes quittèrent leur foyer pour s'entasser dans des tranchées boueuses.

Victor Raturel fut, lui-aussi, mobilisé comme ses coreligionnaires. Il fut incorporé au deuxième régiment d'artillerie à Amblény. Il vivait dans le froid et dans la peur. Mais une chose le détournait du désolant spectacle qu'il avait sous les yeux : il n'oubliait pas son affaire.

Cette dernière restait pendante devant la Chambre des Requêtes de la Cour de Cassation. Il se tint informé écrivant des lettres suivies à son conseil dans la fureur des armes. Or, cette correspondance particulière en temps de guerre n'échappa à la censure de l'armée qui découvrit dans ses rangs l'importun qui avait fait perdre autant de temps à l'industrie d'armement. Le soldat Raturel fut convoqué devant sa hiérarchie et fut sommé de se désister de son pourvoi à titre d'exemple. Il refusa net, ce qui lui valut des arrêts pour insubordination. Devant la persistance de cet esprit de rébellion, il fut versé dans les premières lignes les plus exposées. L'obstination de Raturel ne fut que plus vive. Il se sentit plus fort qu'auparavant, l'espoir le tenant vif et audacieux durant la bataille. Son procès l'obsédait. Celui-ci finit par se tenir à l'automne 1915.

Son pourvoi fut entièrement rejeté et notre personnage fut condamné à une amende pour procédure abusive. L'annonce de cette décision transperça le cœur de notre paysan qui finit par baisser la garde quelques jours après...

                                                            M. Aragnieux

 

sources librement interprétées :

arrêt célèbre Clément- Bayard du 3 août 1915

http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000007070363&dateTexte=

http://www.hydroretro.net/etudegh/clement-bayard.pdf

  http://www.france-voyage.com/

 

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Commenter cet article
L
<br /> <br /> Bonjour L<br /> <br /> <br /> Guerre de voisinage qui reste bien vivante dans les tranchées, ce Victor est vraiment très obstiné !<br /> <br /> <br /> Ce fut un grand plaisir de suivre cette nouvelle, bravo L <br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
L
<br /> <br /> Il en allait de ses intérêts toujours bien compris...<br /> <br /> <br /> <br />