21 Mai 2010
La métaphore des saisons occupe une place importante dans la littérature. Il est bon de s'interroger sur son sens. Que veut dire l'auteur lorsqu'il évoque une saison ? Cela dépasse le cadre de la simple description du changement de la nature. On compare les saisons à l'homme. Pourquoi ? Comment ? Vous saurez (presque) tout...
Repères : thème des saisons : l'étude
S'inspirant de l'influence des saisons sur l'homme, la Littérature a abordé le thème du bouleversement du corps et de l'esprit à de nombreuses reprises. L'emploi de la métaphore d'une saison illustre parfaitement la problématique humaine.
Dans le cadre de cette étude, deux œuvres seront proposées à votre lecture :
Deux saisons distinctes au travers de deux personnages différents, l'été pour le poète, le printemps pour une jeune héroïne.
Au travers de ces livres, le cycle des saisons joue néanmoins le même rôle de catalyseur permettant l'éclosion d'une personnalité nouvelle.
Cette œuvre en prose apparemment décousue est constituée de passages successifs au travers desquels le poète rejette dans un style délibérément provocateur tout héritage héréditaire, culturel ou spirituel, honnissant le monde en général et l'Occident en particulier. L'auteur s'adonne alors avec une fièvre intense à la fange et au sacrilège avant qu'une révélation ne se fasse jour. Une unité de l'œuvre apparaît néanmoins dans ce recueil qui s'articule en réalité autour du passage d'une saison. Mais de quelle saison s'agit-il ?
Rimbaud plonge en effet brutalement le lecteur dans une saison qui ne porte pas de nom. Mais il le met sur la voie lors de l'étrange constat établissant que «le printemps m'a apporté l'affreux rire de l'idiot» (prologue). Ce ricanement résonne comme un grincement de porte tout au long du livre. Cette saison dont on cherche toujours le nom est néanmoins associée au soleil brûlant : « Ah! les poumons brûlent, les tempes grondent ! La nuit roule dans mes yeux, par ce soleil ! » (Mauvais Sang in fine). Dépassant le cadre d'un simple lieu, l'enfer prend aussi corps dans le temps. L'enfer par opposition au ciel est recherché durant une saison.
Après s'être proclamé maudit avec force, le poète revendique avec délice son statut de réprouvé. Il aspire à brûler en enfer, sacrilège suprême : « Je meurs de lassitude. C'est un tombeau, je m'en vais aux vers, horreur de l'horreur ! Satan, farceur, tu veux me dissoudre, avec tes charmes. Je réclame. Je réclame ! un coup de fourche, une goutte de feu.» (Nuit de l'enfer). Il porte l'œuvre brûlante à un paroxysme ultime, fait de délires et d'hallucinations, dans une ivresse débridée. Le style de Rimbaud, totalement libéré, est d'une poésie éblouissante :
« À quatre heures du matin, l'été
le sommeil d'amour dure encore.
Sous les bocages s'évapore
l'odeur du soir fêté » (délires II)
Cependant un éclair de lucidité va s'emparer du poète. Cette saison infernale n'a en effet qu'un temps. De manière fulgurante, Rimbaud va revenir à la vie en proclamant que le travail est la seule valeur noble : « Moi ! Moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan ! » (Adieu). L'automne s'est installé loin du soleil éternel avec le cortège des fantasmagories. L'automne de la vie et l'acceptation des réalités sèches voient donc enfin le jour. Le poète devient homme, libéré de toutes ses faiblesses et prêt à repartir.
Une autre œuvre nous propose de suivre l'éclosion d'une jeune fille au rythme d'une saison.
Repère à suivre: La mémorphose du printemps (Le Clézio)