Analyse-Livres & Culture pour tous
5 Septembre 2010
La littérature et la Presse sont liées notamment dans le cadre d'engagements politiques. Prenons la Révolution de 1830 commentée par Charles Nodier, écrivain appartenant au courant romantique.
Repère: le thème du journal : présentation
Dans l'article précédent, nous avons évoqué le rapport de la littérature et la Presse avec Benjamin Constant, nous poursuivons aujourd'hui avec le commentaire porté sur la Révolution de 1830 par un écrivain.
Le XIXème siècle est marqué par des révolutions politiques de grande ampleur.
Prenons celle de 1830 qui a donné lieu au renversement de Charles X (frère de Louis XVI et de Louis XVIII).
Ce dernier a en effet promulgué le 26 juillet 1830 cinq ordonnances attentatoires aux libertés publiques relatives à :
Le peuple de Paris dresse immédiatement des barricades. Il s'ensuit trois journées d'émeutes que les auteurs romantiques qualifient de «Trois Glorieuses», au terme desquelles l'héritier des Bourbons devra s'enfuir et laisser le trône à son cousin, le duc d'Orléans, futur Louis-Philippe. Ce dernier sera lui-même chassé du pouvoir par une nouvelle révolution en 1848.
Dans cette perspective, relisons l'amère constat fait par Charles Nodier, écrivain appartenant au courant romantique.
Nodier soutient une position tout à fait étonnante sur la portée des Révolutions. On peut même la qualifier de conservateur rétrograde puisqu'il comptabilise les bénéfices que l'on peut en escompter. C'est une explication tout à fait spécieuse qu'il vous est proposé de lire. Qui dit qu'un écrivain ne peut pas se tromper ?
« Stupide est la foule qui s’ingère de participer aux grands mouvemens des affaires politiques; stupide, aveugle et insensée, car elle n’entrera jamais pour rien dans leurs résultats. Toute révolution qui échoue tourne au profit des pouvoirs qu’elle avait menacés; toute révolution qui réussit, au profit des avocats. Dans le premier cas, vous n’avez fait que river votre chaîne; dans le second, ce que vous croyez avoir conquis sur les aristocrates vous est repris par les sophistes. Vous avez transporté au péril de votre vie les dépouilles de la féodalité dans le vestiaire du sénat, et vous restez, quant à vous, ce que vous étiez devant : une mine bonne à exploiter, un troupeau bon à tondre, un peuple.
Le seul avantage que les révolutions aient pour les classes inférieures, et je conviens qu’il vaudrait la peine d’être acheté, si on ne le payait pas si cher, c’est de relever le caractère moral de l’homme en lui donnant pour objet une destination puissante et solennelle qui ne s’accomplira point, mais dont la pensée même a de l’énergie et de la grandeur. C’est une illusion de perspective, mais le prestige qui en résulte est déjà une conquête. Il est possible enfin, lorsque l’âme s’est élevée à cette hauteur, qu’elle réfléchisse encore long-temps après, jusque dans l’état d’abaissement où toute l’espèce ne tarde pas à retomber, quelque faible rayon de la dignité éphémère que les circonstances lui avaient donnée, comme l’histrion de province qui a ceint un moment la couronne d’Agamemnon, comme le manœuvre à la barbe touffue qui vient de poser pour Jupiter. (...) »
Les sociétés Populaires I, Charles Nodier (1780-1844), Revue des Deux Mondes, T1, 1831
source : http://fr.wikisource.org/wiki/Les_Soci%C3%A9t%C3%A9s_populaires
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