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Analyse-Livres & Auteurs-Culture

La méditation au coin du feu (Octave Mirbeau)

Critiquant le système électoral bourgeois et le tempérament grégaire des électeurs, le pamphlétaire Octave Mirbeau lançait un vibrant appel à la grève des électeurs dans le Figaro daté du 28 novembre 1888, en préconisant un retour à la lecture instructive et éclairante autour du feu...

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repères : les quatre éléments : le feu

Plan

Il vous est proposé une succession d'articles illustrant le thème du feu dans la littérature :

Octave Mirbeau

Le feu n'est pas qu'un élément d'effroi, il peut aussi nous porter, autour de l'âtre, à la méditation.

La Gazette, au mois de septembre 2010, avait proposé un article relatif au rapport entre la Littérature et la Presse.

Grève des électeurs

Un auteur anarchiste particulièrement flamboyant était à l'honneur : Octave Mirbeau, écrivain, journaliste, pamphlétaire, anarchiste patenté, critiquant le système électoral bourgeois et le tempérament grégaire des électeurs lançait un vibrant appel à la grève des électeurs dans le Figaro daté du 28 novembre 1888...

Quel est donc le rapport avec le feu ?

Il préconise un retour à la lecture instructive et éclairante autour du feu...

« (…) Ô bon électeur, inexprimable imbécile, pauvre hère, si, au lieu de te laisser prendre aux rengaines absurdes que te débitent chaque matin, pour un sou, les journaux grands ou petits, bleus ou noirs, blancs ou rouges, et qui sont payés pour avoir ta peau; si, au lieu de croire aux chimériques flatteries dont on caresse ta vanité, dont on entoure ta lamentable souveraineté en guenilles, si, au lieu de t’arrêter, éternel badaud, devant les lourdes duperies des programmes; si tu lisais parfois, au coin du feu, Schopenhauer et Max Nordau, deux philosophes qui en savent long sur tes maîtres et sur toi, peut-être apprendrais-tu des choses étonnantes et utiles.

Peut-être aussi, après les avoir lus, serais-tu moins empressé à revêtir ton air grave et ta belle redingote, à courir ensuite vers les urnes homicides où, quelque nom que tu mettes, tu mets d’avance le nom de ton plus mortel ennemi. Ils te diraient, en connaisseurs d’humanité, que la politique est un abominable mensonge, que tout y est à l’envers du bon sens, de la justice et du droit, et que tu n’as rien à y voir, toi dont le compte est réglé au grand livre des destinées humaines.

Rêve après cela, si tu veux, des paradis de lumières et de parfums, des fraternités impossibles, des bonheurs irréels. C’est bon de rêver, et cela calme la souffrance. Mais ne mêle jamais l’homme à ton rêve, car là où est l’homme, là est la douleur, la haine et le meurtre. Surtout, souviens-toi que l’homme qui sollicite tes suffrages est, de ce fait, un malhonnête homme, parce qu’en échange de la situation et de la fortune où tu le pousses, il te promet un tas de choses merveilleuses qu’il ne te donnera pas et qu’il n’est pas d’ailleurs, en son pouvoir de te donner. L’homme que tu élèves ne représente ni ta misère, ni tes aspirations, ni rien de toi; il ne représente que ses propres passions et ses propres intérêts, lesquels sont contraires aux tiens. Pour te réconforter et ranimer des espérances qui seraient vite déçues, ne va pas t’imaginer que le spectacle navrant auquel tu assistes aujourd’hui est particulier à une époque ou à un régime, et que cela passera.

Toutes les époques se valent, et aussi tous les régimes, c’est-à-dire qu’ils ne valent rien. Donc, rentre chez toi, bonhomme, et fais la grève du suffrage universel. Tu n’as rien à y perdre, je t’en réponds ; et cela pourra t’amuser quelque temps. Sur le seuil de ta porte, fermée aux quémandeurs d’aumônes politiques, tu regarderas défiler la bagarre, en fumant silencieusement ta pipe.

Et s’il existe, en un endroit ignoré, un honnête homme capable de te gouverner et de t’aimer, ne le regrette pas. Il serait trop jaloux de sa dignité pour se mêler à la lutte fangeuse des partis, trop fier pour tenir de toi un mandat que tu n’accordes jamais qu’à l’audace cynique, à l’insulte et au mensonge.

Je te l’ai dit, bonhomme, rentre chez toi et fais la grève. »

Octave Mirbeau , Grève des électeurs, Figaro 1888

Source : « https://fr.wikisource.org/wiki/La_Gr%C3%A8ve_des_%C3%A9lecteurs »

gazette-tetiere.jpgSi vous avez aimé cet article, vous aimerez peut-être Les tourments et les joies du métier (V) : les gens de maison

repère à suivre : l'effroi auprès du feu

 

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L
<br /> <br /> Les conseils de Mirbeau pourraient être d'actualité !<br /> <br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> je trouve aussi...<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> <br /> Rien de nouveau sous le soleil...<br /> <br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Déjà à la fin du XIXème siècle !<br /> <br /> <br /> <br />