Analyse-Livres & Culture pour tous
9 Février 2010
Le thème de la justice dans la littérature nous conduit à découvrir une très belle déclaration d'un accusé. Il s'agit de Julien Sorel dans le Rouge et le Noir de Stendhal.
repère : thème de la justice : présentation
Dans l'article précédent, nous avons vu la plaidoirie d'un mauvais avocat dans l'affaire Crainquebille, découvrons aujourd'hui la déclaration faite par l'accusé lui-même puisque l'on n'est jamais mieux servi que par soi-même.
« Je ne vous demande aucune grâce, continua Julien en affermissant sa voix. Je ne me fais point illusion, la mort m’attend : elle sera juste. J’ai pu attenter aux jours de la femme la plus digne de tous les respects, de tous les hommages. Mme de Rênal avait été pour moi comme une mère. Mon crime est atroce, et il fut prémédité. J’ai donc mérité la mort, messieurs les jurés. Quand je serais moins coupable, je vois des hommes qui, sans s’arrêter à ce que ma jeunesse peut mériter de pitié, voudront punir en moi et décourager à jamais cette classe de jeunes gens qui, nés dans une classe inférieure, et en quelque sorte opprimés par la pauvreté, ont le bonheur de se procurer une bonne éducation, et l’audace de se mêler à ce que l’orgueil des gens riches appelle la société.
« Voilà mon crime, messieurs, et il sera puni avec d’autant plus de sévérité, que, dans le fait, je ne suis point jugé par mes pairs. Je ne vois point sur les bancs des jurés quelque paysan enrichi, mais uniquement des bourgeois indignés... »
Pendant vingt minutes, Julien parla sur ce ton ; il dit tout ce qu’il avait sur le cœur ; l’avocat général, qui aspirait aux faveurs de l’aristocratie, bondissait sur son siège ; mais malgré le tour un peu abstrait que Julien avait donné à la discussion, toutes les femmes fondaient en larmes. (...) »
Le Rouge et le Noir, Stendhal, IIème partie, Chapitre XLI, Le jugement : Wikisource
repère à suivre : la peine capitale
Retrouvez la plaidoirie d'un avocat (Anatole France)