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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

La furie des flots (Defoë)

 

tempête (déc 2011) La furie des flots (Defoë)

(tempête, litteratus)

Repères : thème de la mer : présentation

 

Les contradictions d'un héros

Après la chasse à la Baleine avec Melville, découvrons la furie des flots.

La tempête déchaînée a donné lieu à de nombreuses évocations dans la littérature. Il convenait de faire des choix finalement pas si simples.

 

La Gazette Littéraire vous propose aujourd'hui de retrouver un personnage célèbre que tout le monde croit connaître : Robinson Crusoé. Mais connaissons-nous son parcours dans le détail ?

 

Robinson Crusoé s'avère être avant tout un homme volontaire. En effet contre la volonté de ses parents, le voilà qui quitte York en Angleterre pour voyager sur les mers avant qu'il ne se fasse capturer et réduire en esclavage chez les Maures durant deux années.

 

Il trouvera l'occasion de s'en échapper et deviendra propriétaire d'une plantation au Brésil.

 

Dans l'extrait d'aujourd'hui, nous nous plaçons au moment où notre héros âgé de vingt-huit ans et lucide devant les dangers qu'il va rencontrer – il a pris soin de rédiger un testament- embarque une nouvelle fois avec l'espoir de ramener des esclaves dans sa plantation. C'est alors que ce dernier subit avec ses compagnons une terrible tempête....

 

****

"Bien que nous nous aperçûmes en effet que le vent s’était un peu apaisé, néanmoins notre vaisseau ainsi échoué sur le sable, étant trop engravé pour espérer de le remettre à flot, nous étions vraiment dans une situation horrible, et il ne nous restait plus qu’à songer à sauver notre vie du mieux que nous pourrions. Nous avions un canot à notre poupe avant la tourmente, mais d’abord il s’était défoncé à force de heurter contre le gouvernail du navire, et, ensuite, ayant rompu ses amarres, il avait été englouti ou emporté au loin à la dérive ; nous ne pouvions donc pas compter sur lui. Nous avions bien encore une chaloupe à bord, mais la mettre à la mer était chose difficile ; cependant il n’y avait pas à tergiverser, car nous nous imaginions à chaque minute que le vaisseau se brisait, et même quelques-uns de nous affirmaient que déjà il était entrouvert.

Alors notre second se saisit de la chaloupe, et, avec l’aide des matelots, elle fut lancée par-dessus le flanc du navire. Nous y descendîmes tous, nous abandonnant, onze que nous étions, à la merci de Dieu et de la tempête ; car, bien que la tourmente fût considérablement apaisée, la mer, néanmoins, s’élevait à une hauteur effroyable contre le rivage, et pouvait bien être appelée dm wild zee — la mer sauvage— , comme les Hollandais l’appellent lorsqu’elle est orageuse.

Notre situation était alors vraiment déplorable, nous voyions tous pleinement que la mer était trop grosse pour que notre embarcation pût résister, et qu’inévitablement nous serions engloutis. Comment cingler, nous n’avions pas de voiles, et nous en aurions eu que nous n’en aurions rien pu faire. Nous nous mîmes à ramer vers la terre, mais avec le cœur gros et comme des hommes marchant au supplice. Aucun de nous n’ignorait que la chaloupe, en abordant, serait brisée en mille pièces par le choc de la mer. Néanmoins après avoir recommandé nos âmes à Dieu, de la manière la plus fervente, nous hâtâmes de nos propres mains notre destruction en ramant de toutes nos forces vers la terre où déjà le vent nous poussait.

Le rivage était-il du roc ou du sable, était-il plat ou escarpé, nous l’ignorions. Il ne nous restait qu’une faible lueur d’espoir, c’était d’atteindre une baie, une embouchure de fleuve, où par un grand bonheur nous pourrions faire entrer notre barque, l’abriter du vent, et peut-être même trouver le calme. Mais rien de tout cela n’apparaissait ; mais à mesure que nous approchions de la rive, la terre nous semblait plus redoutable que la mer.

Après avoir ramé, ou plutôt dérivé pendant une lieue et demie, à ce que nous jugions, une vague furieuse, s’élevant comme une montagne, vint, en roulant à notre arrière, nous annoncer notre coup de grâce. Bref, elle nous saisit avec tant de furie que d’un seul coup elle fit chavirer la chaloupe et nous en jeta loin, séparés les uns des autres, en nous laissant à peine le temps de dire « ô mon Dieu ! » car nous fûmes tous engloutis en un moment.

Robinson Crusoé, Daniel Defoë, traduction Pétrus Borel

http://fr.wikisource.org/wiki/Robinson_Cruso%C3%A9/8

 

Repères à suivre : le naufrage de Candide (Voltaire)

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