Analyse-Livres & Culture pour tous
24 Octobre 2013
Comment fabrique-t-on une librairie idéale ?
repères : thème de la diffusion : l'étude
résumé : il a été indiqué dans l'article précédent les pratiques commerciales différentes des deux libraires, objets de notre étude. Il convient aujourd'hui de voir en quoi ces deux établissements font figure de mythe.
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La boutique du 84 Charing Cross Road est passée d'une obscure boutique à un lieu de curiosité touristique. La publication de ce récit en 1970 en a fait un modèle du genre avant de se voir condamnée par le temps. La librairie du 84 Charing Cross Road n'existe plus...Mais ce récit l'a fait entrer dans une autre dimension intemporelle : le mythe. La librairie idéale se découvre au travers de la lecture de ce récit. Helene Hanff, la cliente extravagante et Frank Doel, le libraire, forment un duo d'intelligence et d'humour. Ils se sentent complices et partagent la même passion du livre. Le libraire a sauvé de l'oubli des collections entières d'ouvrages et sa cliente leur a donné une nouvelle vie en s'abreuvant à leur source. Enfin, elle a rendu hommage à tous ces livres …
Hélene Hanff conclut en disant :
« si par hasard vous passez devant le 84 Charing Cross Road, embrassez-le pour moi ! Je lui dois tant ! » (page 142).
Elle lui doit en effet de détenir aux Etats-Unis une des plus fines bibliothèques privées d'ouvrages de littérature anglaise. L'auteur lui doit en outre le succès littéraire après lequel elle a couru toute sa vie. La publication de ce court récit a en effet créé un engouement immédiat qui ne se dément pas, quarante-trois ans plus tard...
Chacun perçoit en effet la singularité de la librairie du 84 Charing Cross Road, un véritable temple dédié aux livres.
Laurence Cossé fait aussi de la librairie née sous sa plume, un mythe, celui d'une libraire idéale, où la qualité de l'offre serait recherchée sans fin, sans arrière pensée mercantile. On voit bien que cette quête est impossible dans la mesure où les goûts diffèrent d'un lecteur à un autre et que les contraintes économiques pèsent aussi sur ce type de commerce. Derrière cette librairie fictive, par trop prescriptive dans son projet, la critique implacable des compromissions du monde littéraire au sens large est terrible. Il reste que ce roman sur les « bons » romans nous renvoie à notre propre rapport au livre : ce dernier peut-il être un produit marchand comme les autres ? Devons-nous céder à la dictature de la nouveauté ? Comment relire des livres oubliés ? Que serait enfin un monde sans livres ?
Autant de questions que suscite la « mythique » librairie du Bon roman...
repères à suivre : la synthèse