5 Janvier 2012
Repères : thème du pouvoir : représentation dans la Littérature
Dans l'article précédent, il a été montré que l'exercice du pouvoir ne s'est pas fait sans l'utilisation d'une violence à l'égard du peuple. Mais cette violence a pu également se retourner contre le détenteur du pouvoir.
La Gazette vous propose de lire un extrait saisissant reprenant dans le détail le complot visant à l'assassinat de César par des conjurés, tous membres de l'illustre cercle du Sénat.
La violence à Rome n'était pas un vain mot, les vingt-trois coups de couteaux laissés sur le corps de César en témoignent amplement.
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« Lorsqu'il s'assit, les conjurés l'entourèrent, sous prétexte de lui rendre leurs devoirs. Tout à coup Tillius Cimber, qui s'était chargé du premier rôle, s'approcha davantage comme pour lui demander une faveur ; et César se refusant à l'entendre et lui faisant signe de remettre sa demande à un autre temps, il le saisit, par la toge, aux deux épaules. "C'est là de la violence," s'écrie César ; et, dans le moment même, l'un des Casca, auquel il tournait le dos, le blesse, un peu au-dessous de la gorge. César, saisissant le bras qui l'a frappé, le perce de son poinçon, puis il veut s'élancer ; mais une autre blessure l'arrête, et il voit bientôt des poignards levés sur lui de tous côtés. Alors il s'enveloppe la tête de sa toge, et, de la main gauche, il en abaisse en même temps un des pans sur ses jambes, afin de tomber plus décemment, la partie inférieure de son corps étant ainsi couverte. Il fut ainsi percé de vingt-trois coups : au premier seulement, il poussa un gémissement, sans dire une parole. Toutefois, quelques écrivains rapportent que, voyant s'avancer contre lui Marcus Brutus, il dit en grec : "Et toi aussi, mon fils !" Quand il fut mort, tout le monde s'enfuit, et il resta quelque temps étendu par terre. Enfin trois esclaves le rapportèrent chez lui sur une litière, d'où pendait un de ses bras. De tant de blessures, il n'y avait de mortelle, au jugement du médecin Antistius, que la seconde, qui lui avait été faite à la poitrine. L'intention des conjurés était de traîner son cadavre dans le Tibre, de confisquer ses biens , et d'annuler ses actes : mais la crainte qu'ils eurent du consul Marc-Antoine et de Lépide, maître de la cavalerie, les fit renoncer à ce dessein. »
La vie des douze Césars, Suétone,Traduction Nisard - 1855
http://fr.wikisource.org/wiki/Vie_des_douze_C%C3%A9sars/C%C3%A9sar#82
Repères à suivre : thème du pouvoir : la justification du gouvernement monarchique (Bossuet)