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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

L'art dans la littérature : hommage à un peintre (2) (Hugo)

"Ô mon maître Albert Düre, ô vieux peintre pensif !", découvrez l'hommage en vers de Hugo à Dürer dans son recueil Les voix intérieures : il s'incline devant le peintre du mystère et visionnaire...

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Repères à suivre  : thème de l'Art : présentation

Plan

La Gazette littéraire propose durant tout le mois de novembre 2011 d'établir le lien entre la Littérature et les Beaux-Arts au travers d'une présentation sous forme d'anthologie, suivant la progression suivante : 

Après l'hommage rendu à tous les peintres par Baudelaire, découvrons celui, plus personnel, que Victor Hugo a rendu à Dürer, peintre et graveur allemand (1471-1528) : le peintre du mystère et visionnaire...

Hugo

À Albert Dürer


Dans les vieilles forêts où la sève à grands flots
Court du fût noir de l'aulne au tronc blanc des bouleaux,
Bien des fois, n'est-ce pas ? à travers la clairière,
Pâle, effaré, n'osant regarder en arrière,
Tu t'es hâté, tremblant et d'un pas convulsif,
Ô mon maître Albert Düre, ô vieux peintre pensif !
On devine, devant tes tableaux qu'on vénère,
Que dans les noirs taillis ton œil visionnaire
Voyait distinctement, par l'ombre recouverts,
Le faune aux doigts palmés, le sylvain aux yeux verts,
Pan, qui revêt de fleurs l'antre où tu te recueilles,
Et l'antique dryade aux mains pleines de feuilles.
Une forêt pour toi, c'est un monde hideux.
Le songe et le réel s'y mêlent tous les deux.
Là se penchent rêveurs les vieux pins, les grands ormes
Dont les rameaux tordus font cent coudes difformes,
Et dans ce groupe sombre agité par le vent,
Rien n'est tout à fait mort ni tout à fait vivant.
Le cresson boit ; l'eau court ; les frênes sur les pentes,
Sous la broussaille horrible et les ronces grimpantes,
Contractent lentement leurs pieds noueux et noirs.
Les fleurs au cou de cygne ont les lacs pour miroirs ;
Et sur vous qui passez et l'avez réveillée,
Mainte chimère étrange à la gorge écaillée,
D'un arbre entre ses doigts serrant les larges nœuds,
Du fond d'un antre obscur fixe un œil lumineux.
O végétation ! esprit ! matière ! force !
Couverte de peau rude ou de vivante écorce !
Aux bois, ainsi que toi, je n'ai jamais erré,
Maître, sans qu'en mon cœur l'horreur ait pénétré,
Sans voir tressaillir l'herbe, et, par le vent bercées,
Pendre à tous les rameaux de confuses pensées.

 

Dieu seul, ce grand témoin des faits mystérieux,
Dieu seul le sait, souvent, en de sauvages lieux,
J'ai senti, moi qu'échauffe une secrète flamme,
Comme moi palpiter et vivre avec une âme,
Et rire, et se parler dans l'ombre à demi-voix,
Les chênes monstrueux qui remplissent les bois

20 avril 1837

Victor Hugo, Les voix intérieures,

https://fr.wikisource.org/wiki/%C3%80_Albert_D%C3%BCrer

Repères à suivre  l'architecture urbaine

 

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C
<br /> <br /> Quand les blogs se rencontrent sur un même thème très porteur ! Merci d'avoir su éviter encore une fois de faire, comme vous le dites, un doublon.<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
L
<br /> <br /> Honneur au spécialiste !<br /> <br /> <br /> <br />