Analyse-Livres & Culture pour tous
3 Novembre 2013
Repères : thème de la porte : illustration
Nous débuterons notre présentation en montrant que dans la vie de tous les jours, l'on dissocie rarement la porte des fenêtres, les deux allant de pair... Avant d'entrer dans le champ de la littérature proprement dite, la Gazette tient à introduire le sujet en mettant à l'honneur une loi particulière en son genre qui a créé un impôt largement oublié mais qui a laissé quelques "stigmates" dans la chair de nos anciens bâtiments.
Il s'agit d'une taxe sur les portes et fenêtres qui a été instituée sous le Directoire (1798). Elle cherchait à engranger de nouvelles recettes auprès de propriétaires taxés de manière proportionnelle, en fonction du nombre d'ouvertures dans leur demeure.
On connaît l'appétence de nos gouvernements actuels pour la création de taxes diverses et variées. N'oublions pas que cette pratique n'est pas récente, elle remonte à une époque lointaine !
On a pu déjà à l'époque vérifier une loi -désormais immuable- qui consiste à considérer qu'un nouvel impôt, porteur de promesses de recettes fiscales, produit des effets pervers : on sait que par un effet mécanique, l'assiette fiscale va se rétrécir sous l'effet de l'imposition. L'objet taxé se trouve vite appelé, lorsqu'il le peut, à disparaître... C'est précisément ce qui s'est passé avec ce curieux impôt.
Les effets pervers de l'impôt sur les portes et fenêtres
L'imposition en question a eu pour effet de conduire les propriétaires à murer purement et simplement des ouvertures. Pire, les plus avisés ont fait construire des bâtiments avec des petites fenêtres ne laissant guère passer le jour et ne permettant pas une ventilation efficace. L'impôt a produit peu de recettes fiscales mais beaucoup d''insalubrité, laquelle pénalisait essentiellement les locataires, la population la plus pauvre. Précisons que cet impôt improductif n'a été aboli qu'en 1926, preuve qu'il faut du temps à l'Etat pour se rendre compte de ses erreurs de jugement...
Il vous est proposé de lire le texte de loi en lui-même avant de retrouver une de ses illustrations dans la littérature du XIXème siècle avec les Mystères de Paris d'Eugène Sue qui situe l'action en 1830.
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Le 24 novembre 1798 (4 frimaire an VII), le gouvernement français créa une sorte d’impôt sur les signes extérieurs de richesse. La décision se présentait ainsi :
Article premier : Il y aura pour l'an VII une contribution réglée de la manière suivante :
Article 2 : Cette contribution est établie sur les portes et fenêtres donnant sur les rues, cours ou jardins des bâtiments et usines, sur tout le territoire de la République, et dans les proportions ci-après.
Article 3 : Les portes et fenêtres, dans les communes au-dessous de cinq mille âmes, payeront 0 fr 20; de cinq à dix mille, 0 fr 25 ; de dix à vingt-cinq mille, 0 fr 30; de vingt-cinq à cinquante mille, 0 fr 40; de cinquante à cent mille, 0 fr 50; de cent mille et au-dessus, 0 fr 60. Les portes-cochères et celles de magasins, de marchands en gros, commissionnaires et courtiers, payeront double contribution.
Article 4 : Dans les communes au-dessus de dix mille âmes, les fenêtres des troisième, quatrième et cinquième étages et au-dessus ne payeront que 0 fr 25.
Article 5 : Ne sont pas soumises à la contribution établie par la présente les portes et fenêtres servant à éclairer ou aérer les granges, bergeries, étables, greniers, caves et autres locaux non destinés à l'habitation des hommes, ainsi que toutes les ouvertures du comble ou toitures des maisons habitées.
Ne sont pas également soumises à ladite contribution les portes et fenêtres des bâtiments employés à un service public civil, militaire ou d'instruction, ou aux hospices.
Néanmoins, si lesdits bâtiments sont occupés en partie par des citoyens auxquels la République ne doit point de logement d'après les lois existantes, lesdits citoyens seront soumis à ladite contribution, à concurrence des parties desdits bâtiments qu'ils occuperont.
Article 6 : Les municipalités seront tenues, dans les dix jours de la réception de la présente loi, de faire, ou de faire faire par des commissaires, l'état des portes et fenêtres sujettes à l'imposition.
http://fr.wikisource.org/wiki/Imp%C3%B4t_sur_les_portes_et_fen%C3%AAtres
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« Durant le jour, ce taudis est éclairé par une lucarne étroite, oblongue, pratiquée dans la partie déclive de la toiture, et garnie d’un châssis vitré qui s’ouvre et se ferme au moyen d’une crémaillère. »
Les Mystères de Paris, Eugène Sue
http://fr.wikisource.org/wiki/Les_Myst%C3%A8res_de_Paris/Partie_III#XVIII._Mis.C3.A8re
repères à suivre : la présentation : portes et fenêtres closes