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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

L'arrivée du curé de Cucugnan aux enfers (Daudet)

  

Dans la nouvelle d'Alphonse Daudet, le curé de Cucugnan, nous poursuivons son récit de voyage qui le conduit du purgatoire aux enfers à la recherche de ses paroissiens décédés. Y seront-ils cette fois ?

 

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repères : thème du voyage : Curé de Cucugnan (Daudet)

Il vous est proposé de reprendre la lecture de la nouvelle de Daudet intitulée le curé de Cucugnan, extrait des Lettres de mon moulin de Daudet (1869).

Résumé

Nous avons laissé le curé de Cucugnan au Purgatoire, lieu où il n'a pu retrouver aucune de ses ouailles. C'est ainsi qu'il se dirige et péniblement vers le seul endroit désormais possible :  les enfers. Il sait qu'il va y retrouver ses paroissiens..

Enfers

"« C’était un long sentier tout pavé de braise rouge. Je chancelais comme si j’avais bu ; à chaque pas, je trébuchais ; j’étais tout en eau, chaque poil de mon corps avait sa goutte de sueur, et je haletais de soif... Mais, ma foi, grâce aux sandales que le bon saint Pierre m’avait prêtées, je ne me brûlai pas les pieds.

« Quand j’eus fait assez de faux pas clopin-clopant, je vis à ma main gauche une porte... non, un portail, un énorme portail, tout bâillant, comme la porte d’un grand four. Oh ! mes enfants, quel spectacle ! Là on ne demande pas mon nom ; là, point de registre. Par fournées et à pleine porte, on entre là, mes frères, comme le dimanche vous entrez au cabaret.

« Je suais à grosses gouttes, et pourtant j’étais transi, j’avais le frisson. Mes cheveux se dressaient. Je sentais le brûlé, la chair rôtie, quelque chose comme l’odeur qui se répand dans notre Cucugnan quand Éloy, le maréchal, brûle pour la ferrer la botte d’un vieil âne. Je perdais haleine dans cet air puant et embrasé ; j’entendais une clameur horrible, des gémissements, des hurlements et des jurements.

« — Eh bien ! entres-tu ou n’entres-tu pas, toi ? — me fait, en me piquant de sa fourche, un démon cornu.

« — Moi ? Je n’entre pas. Je suis un ami de Dieu.

« — Tu es un ami de Dieu... Eh ! b... de teigneux ! que viens-tu faire ici ? ...

« — Je viens... Ah ! ne m’en parlez pas, que je ne puis plus me tenir sur mes jambes... Je viens... je viens de loin... humblement vous demander... si... si, par coup de hasard... vous n’auriez pas ici... quelqu’un... quelqu’un de Cucugnan...

« — Ah ! feu de Dieu ! tu fais la bête, toi, comme si tu ne savais pas que tout Cucugnan est ici. Tiens, laid corbeau, regarde, et tu verras comme nous les arrangeons ici, tes fameux Cucugnanais...

« Et je vis, au milieu d’un épouvantable tourbillon de flamme :

« Le long Coq-Galine,— vous l’avez tous connu, mes frères,— Coq-Galine, qui se grisait si souvent, et si souvent secouait les puces à sa pauvre Clairon.

« Je vis Catarinet... cette petite gueuse... avec son nez en l’air... qui couchait toute seule à la grange... Il vous en souvient, mes drôles ! ... Mais passons, j’en ai trop dit.

« Je vis Pascal Doigt-de-Poix, qui faisait son huile avec les olives de M. Julien.

« Je vis Babet la glaneuse, qui, en glanant, pour avoir plus vite noué sa gerbe, puisait à poignées aux gerbiers.

« Je vis maître Grapasi, qui huilait si bien la roue de sa brouette.

« Et Dauphine, qui vendait si cher l’eau de son puits.

« Et le Tortillard, qui, lorsqu’il me rencontrait portant le bon Dieu, filait son chemin, la barrette sur la tête et la pipe au bec... et fier comme Artaban... comme s’il avait rencontré un chien.

« Et Coulau avec sa Zette, et Jacques, et Pierre, et Toni...

Ému, blême de peur, l’auditoire gémit, en voyant, dans l’enfer tout ouvert, qui son père et qui sa mère, qui sa grand’mère et qui sa sœur...

Alphonse Daudet, Les lettres de mon Moulin, Wikisource 

repère à suivre : la fin  

 

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L
Je ne retrouve plus mon commentaire où je vous écrivais que j'avais lu il y a bien longtemps "Les lettres de mon moulin" et ses savoureuses histoires, livre qui se trouvait dans la bibliothèque familiale de mon enfance parmi bien d'autres classiques incontournables.
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