3 Novembre 2025
Bac : Cette fiche synthèse Défendre et Entretenir la liberté est destinée à vous aider à préparer votre dissertation avec des tableaux récapitulatifs et les thématiques principales. Cette fiche s’appuie sur une lecture intégrale de ce livre dans cette édition Garnier-Flammarion pour le bac que vous pouvez toujours retrouver gratuitement sur Spotify. La connaissance complète de ce livre est indispensable si vous souhaitez prendre cette épreuve au bac.
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repère : Bac : La Boétie
Le programme officiel renouvelle cette année les œuvres appartenant à la littérature d'idées.
L'argumentation est un genre difficile qui nécessite une compréhension fine de ce qui est exposé.
Ce livre écrit au 16e siècle pose de nombreuses difficultés à cet égard tant sur le fond que sur la forme.
Avant toute chose, la première difficulté consiste à être capable de le lire en entier.
Devant un tel monument littéraire, il vous est proposé un podcast gratuit en 4 courts épisodes pour vous aider dans cette tâche qui est intéressante.
Vous êtes prêts ?
Débutons par une brève présentation de l’auteur et l’examen des vicissitudes autour de la publication de l’œuvre avant d’entrer dans l’étude proprement dite.
1.1. La présentation de l’écrivain :
On connait peu de choses de la vie de la Boétie, né à Sarlat en 1530 et décédé en 1563 à l’âge de 33 ans. Bref destin de l’auteur du Discours de la servitude volontaire, devenu spontanément une œuvre emblématique de résistance par-delà les crises religieuses et politiques du XVIe siècle, mais au-delà surtout des siècles (ex : La Résistance, Gandhi, Martin Luther King).
Juriste et conseiller au Parlement de Bordeaux, il y rencontre Montaigne avec lequel il noue une amitié indéfectible. C’est un être sensible porté sur la lecture de textes latins qu’il traduit tout comme il aime écrire lui-même de la poésie. Il meurt terrassé par une maladie en instituant Montaigne comme son exécuteur testamentaire.
1.2 La publication de l’œuvre [1]
Dès 1571, Montaigne s’est chargé de la diffusion de certaines œuvres de La Boétie à l’exception du Discours de la servitude volontaire. Pourquoi ? Il compte, en effet, l’insérer dans le premier livre de ses Essais à venir.
Cependant, il est devancé par des personnes qui publient en 1574 un fragment du Discours en latin avant de le traduire en français, dans le recueil pamphlétaire protestant Le Réveille-matin des Français et de leurs voisins.
Le texte complet du Discours qui porte alors le nom du Contr’un est ensuite intégré en 1577 à Genève dans un autre recueil protestant, Les Mémoires de l’État de France sous Charles IX, sous la plume de Simon Goulart.
En 1579, par décision de justice, la totalité de ce recueil est brûlée en place publique à Bordeaux.
C’est dans ces conditions que Montaigne choisit de publier en 1580 ses Essais sans y insérer le Discours de la servitude volontaire. Il le remplace par la diffusion de poèmes de son ami. Il s’en excusera auprès de son public au motif que les troubles politiques (entendez entre protestants et catholiques) expliqueraient son renoncement.
Le texte de la Boétie connaît au cours du siècle suivant une audience relative jusqu’à la nouvelle édition des Essais de Montaigne en 1727 publiée en cinq tomes à La Haye, puis à Genève en 1739 et en 1745 à Londres étant traduite en anglais (villes sans censure). On y trouve le Discours de la servitude volontaire qui se diffuse alors largement.
Lors de la période révolutionnaire, le Discours se présente comme un manifeste contre l’absolutisme. Il faut attendre le XIXe siècle pour que le texte soit lu de manière indépendante de l’ouvrage de Montaigne. Il devient un hymne à la liberté sous la plume de son préfacier, Lamennais. Comme le dit Simone Goyard-Fabre [2] : « la publication de l’œuvre de la Boétie s’est, en tout temps, toujours accompagnée d’intentions militantes, comme si l’essai secrétait un prosélytisme combatif. »
II. Étude du Discours de la servitude volontaire
Ce texte de la Boétie doit être analysé au regard du parcours : « défendre » et « entretenir » la liberté. L’auteur met en scène successivement ces deux axes de réflexion lorsqu’on comprend que :
– le verbe défendre signifie la protection d’un droit, évoquant ainsi un but,
– le verbe entretenir est tourné, lui, vers les moyens tendant à la conservation de ce même droit.
Il vous est proposé d’étudier ces deux notions comparativement au travers du plan suivant :
Plan
1. La tyrannie : comprendre pour résister,
2. Les procédés argumentatifs du discours :
2.1. Une argumentation directe,
2.2. Une stratégie argumentative :
2.2.1. La raison mathématique,
2.2.2. La persuasion,
2.2.3. Les intentions de l’auteur :
a) les références à l’Antiquité,
b) les références à la Renaissance,
2.3. Les principales figures de style,
2.4. Les registres littéraires,
3. Les ambiguïtés de l’œuvre,
4. La portée philosophique de l’œuvre,
1. La tyrannie
Le tableau récapitulatif avec les citations justificatives vous permet de saisir les différents arguments développés par La Boétie. Ces derniers sont alors confrontés au visa de la thématique défendre et entretenir : la défense repose sur la compréhension des mécanismes de la servitude tandis que le verbe « entretenir » met en lumière les moyens pour demeurer libre.
Précisons que le terme tyran doit être entendu, dans l’esprit de La Boétie, comme le détenteur unique du pouvoir, sans tenir compte du caractère moderne du mot qui lui ajoute un aspect péjoratif. C’est ce système de concentration du pouvoir entre les mains d’un seul qui est appelé ici tyrannie.
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Arguments |
Comprendre les ressorts de la servitude |
Moyens pour l’homme de rester libre |
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La nature de la tyrannie |
3 types de tyrans : -celui qui gouverne un royaume par l'adhésion du peuple, -celui qui exerce le pouvoir mais par la force des armes -celui qui gouverne par hérédité « la succession de leur race » (p. 121).
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Comprendre que toutes les tyrannies sont mauvaises : Dès lors on comprend bien qu'il n'y a pas de différence entre ces 3 sortes de tyrans : « toujours la façon de régner est quasi semblable ». (p.122)
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Le rôle des nombres
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Question d’arithmétique pure : -1 million de millions d'hommes (p. 109) face à un seul (tyran) - « je voudrais sinon entendre (comprendre) comme (comment) il se peut que tant d'hommes, tant de bourgs (villages), tant de villes, tant de nations endurent (supportent) quelques fois un tyran seul, qui n'a puissance que celle qu’ils lui donnent (…) » (p. 109) - le titre de l’œuvre souvent utilisé par la suite « le Contr’Un » montre ce paradoxe saisissant. La conséquence arithmétique : Déséquilibre des forces : le rapport de force est en faveur du plus grand nombre et pourtant ce dernier n’en a pas conscience.
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Comprendre que l’importance du nombre soumis devant le tyran ne signifie pas que par nature les hommes soient lâches ; il n’y a pas de lâcheté collective :
« cela n'est pas couardise » (=lâcheté) (p. 111)
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Refuser d’être sujet Du tyran |
Toute tyrannie est mauvaise : en raison du pouvoir du tyran d’être bon ou mauvais s’il le veut : « on ne se peut jamais assurer qu'il soit bon, puisqu'il est toujours en sa puissance d'être mauvais quand il voudra » (p. 108)
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Résister au tyran : c’est le meilleur moyen de recouvrer sa liberté. Rejet de la violence. Action passive par la désobéissance collective :
« le pays ne consente (plus) à sa servitude ; Il ne faut pas lui ôter rien, mais ne lui donner rien » (p 113)
« si on ne leur bâille (donne) rien, si on ne leur obéit (pas) ; sans combattre sans frapper, ils demeurent nus et défaits et ne sont plus rien sinon que comme la racine n'ayant plus d'humeur (substance) ou alignement la branche devient sèche et morte. » (p. 115)
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Responsabilité de la servitude |
Le peuple est responsable de ce qui lui arrive -Vision péjorative du peuple : « gros populas, de regardant ce qui est devant leurs pieds » (p. 131). - « ce sont donc les peuples mêmes qui se laissent ou plutôt se font gourmander (traiter durement) puisqu'en cessant de servir ils en seraient quittes » (p.113). - « c'est le peuple qui s'asservit, qui se coupe la gorge, qui ayant le choix ou d'être serf (cf. au Moyen Âge un paysan attaché à la terre du seigneur) ou d'être libre, quitte la franchise (ses droits) et prend le joug qui consent à son mal ou plutôt le pourchasse. » (p 114).
Composition du peuple : - les lâches ou les indifférents : « les lâches et engourdis ne savent ni endurer le mal ni recouvrer le bien » (p 115). - les hardis : (courageux) - les avisés : (sages) |
Comprendre que la libération du peuple repose sur le courage de certains : - les hardis (les courageux), les avisés (ceux qui ont de l'intelligence) vont se battre pour conserver leur liberté, « les hardis, pour acquérir le bien qu’ils demandent, ne craignent point le danger ; les avisés ne refusent point la peine » (p.115)
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La nature humaine |
Dualité de la nature humaine : contradiction entre être libre/supporter l’habitude « la nature de l'homme est bien d'être franc et de le vouloir être mais aussi sa nature est telle que naturellement il tient le pli que la nourriture lui donne » (p.130)
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Considérer : - Le tyran comme un homme : « Celui qui vous maîtrise tant n'a que deux yeux, n'a que deux mains, n'a qu'un corps et n'a autre chose que ce qu'à le moindre homme du grand et infini nombre de nos villes sinon que l'avantage que vous lui faites pour vous détruire » (p.116)
- Le goût naturel de l’être humain pour la liberté : « est amère la sujétion (le fait d’être un sujet et non libre) et plaisant d'être libre » (p. 129).
Cf : Illustration de ce goût naturel pour la liberté avec une pure hypothèse : « quelques gens tout neufs » qui choisiraient la liberté (p.122)
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Cause de la servitude :
La coutume |
- Intériorisation de la contrainte : la contrainte n'en devient plus une. L’oubli de la liberté conduit à l’habitude de ne plus l’être : « mais ceux qui viennent après servent sans regret et font volontiers ce que leurs devanciers avaient fait par contrainte » (p. 124) « on ne plaint jamais ce que l'on n'a jamais eu » (p. 130).
- Perte de sa qualité humaine : animalisation de l’homme devenu une bête, dénaturation (perte de la qualité naturelle) : « ayant sur le col (cou) le joug » (p.109) « quel mal contre (événements fâcheux) a été cela qui a pu tant dénaturer (changer la nature) l'homme, seul n'est devrait pour vivre franchement (avec ses droits) et lui faire perdre la souvenance (le souvenir) de son premier être et le désir de le reprendre. » (p 121).
- Comparaison avec les animaux - équivalent à l’homme : le bœuf (joug) : - supériorité de l’animal sur l’homme : a) cri des animaux : « si les hommes ne font trop les sourds, leur crient : vive liberté ! » (p.120) b) lutte des animaux avant de mourir (poissons, oiseaux, gibier, éléphant) c) cas du cheval domestiqué qui lutte pour sa liberté : « et si ne le savons-nous si bien flatter que, quand ce vient à le dompter, ils ne mordent le frein qu'il ne rue contre l'éperon » (p.120) d)l’homme est donc inférieur car il ne se défend pas contre la tyrannie : cf. vers de la Boétie : « Même les bœufs sous le poids du joug geignent/et les oiseaux dans la cage se plaignent » (p. 121)
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- Rompre avec l’habitude et donc la coutume et rôle de l’éducation :
« à entretenir la liberté, ainsi appris effet dès le berceau qu'il ne prendrait point tout le reste des faits illicites de la terre pour perdre le moindre de leur franchise » (p 126).
- Valorisation des hommes éduqués : « ceux-là, quand la liberté serait entièrement perdue et toute hors du monde l'imaginent et la sentent en leur esprit et encore la savourent et la servitude ne leur est de goût pourtant bien qu'on l’accoutre (quelques assaisonnements qu'on lui donne) » (p. 131). Il a une vision aristocratique de l’homme.
- Redevenir un être humain :
« Combien qu'est-ce que l'homme doit avoir plus cher que de se remettre en son droit naturel et par manière de dire, de bête revenir homme ». (p.114)
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1e conséquence pour le peuple
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Restriction du droit de penser et de s’exprimer contribuant au maintien de l'asservissement général : « Ils deviennent tous singuliers en leur fantaisie » (p.131) |
Droit de comploter : Exemple : décision faisant suite à un accord entre deux hommes, Brutus et Cassius, qui ont assassiné Jules César, au nom de la liberté : « Lorsqu’ils entreprirent la délivrance de Rome ou plutôt de tout le monde » (p. 132). |
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2e conséquence pour le peuple |
- Lâcheté des hommes asservis (ce défaut n’est pas dans la nature humaine, mais survient du fait de la coutume) : « les gens deviennent sous les tyrans, lâches et efféminés » (p. 133)
Un peuple soumis : (ils) « ont le cœur bas et mol (mou) et incapable de toutes choses grandes » (p. 134) |
- Courage : Exemple : Hippocrate, le père de la médecine, qui a refusé de soigner l’occupant : « il lui répondit franchement qu'il ferait grande conscience (il aurait des scrupules) de se mêler de guérir les Barbares qui voulaient tuer les Grecs et de bien servir par son art à lui qui entreprenait d'asservir la Grèce » (p. 134)
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1e conséquence pour le tyran : maintenir son pouvoir |
- Fragilité du pouvoir du tyran : Exemple de Xénophon « Les tyrans qui sont contraints, faisant mal à tous se craindre (se méfier) » de tous. (p.135) - Choix du tyran d’engager des mercenaires pour se protéger et protéger son pouvoir : « Les mauvais rois se servent d'étrangers à la guerre et les soudoient (les payent), ne s’osant fier est de mettre à leurs gens, à qui ils ont fait tort, les armes en main » (p. 135).
- Abrutir les asservis : les occuper, les divertir pour qu’ils ne pensent pas à contester son pouvoir : « efféminer leurs gens » (p136) / « les peuples assotis » (rendus sots, idiots). Exemple de Cyrus : « y établit des bordeaux (des bordels), des tavernes et des jeux publics et fit publier une ordonnance que les habitants usent à en faire état (devaient s'y rendre). » Le résultat fut « que jamais depuis contre les Lydiens, il ne fallut tirer un coup d'épée » (p 136) Exemple : Tibère et Néron avec des pains et des jeux pour abrutir le peuple. |
- Rappel de l’histoire : assassinats de tyrans Exemple : Jules César poignardé (complot de Brutus et Cassius)
- Révéler le “secret de la domination » (p145) : - rôle des favoris : « 4 ou 5 qui maintiennent tout le pays en servage » (p.146) - Précarité des favoris qui sont moins libres que les autres hommes : « en font pis que forçats et esclaves » (p149) - création d’une sorte de pyramide de la tyrannie, allant de haut en bas, de favoris en favoris : “il verra que non pas les six mille, mais les cent mille, mais les millions, par cette corde se tiennent au tyran s’aident d’icelle (de celle-ci) » ( p.146). “tyran”//tyranneaux” (p.147) - Annonce d’une mort violente des favoris : « mange peuples » (p. 157)
- Comprendre la solitude du tyran : - absence de toute forme de sincérité : “Le tyran n’est jamais aimé ni n’aime », - tyrannie, empêchement à l’amitié : “il ne goûte pas à la vertu par excellence l’amitié” l’amitié, vertu cardinale : « c’est un nom sacré » (p.153) - damnation éternelle des tyrans : “que la tyrannie qu’il réserve là-bas à part, pour les tyrans et leurs complices, quelques peine particulière” (p.157) |
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2e conséquence pour le tyran :
Religion, nécessaire à la conservation du pouvoir politique |
Tyran, guérisseur « Par ce moyen, ils s’assuraient que le peuple se fierait plus (à) d’eux » (p.139) « ils voulaient mettre la religion devant pour garde-corps » (p.142)
Exemples : - rois d’Égypte - Pyrrhus - Jules César qualifié de « Père du peuple » et à suite, tous les autres prirent le titre de tribun du peuple, (p.139) -Vespasien : “il addressait (redressait) les boiteux” (p.141). -royauté française : saint-chrême etc… |
Avoir conscience de sa naïveté :
« Toutefois ainsi le peuple sot fait lui-même les mensonges, pour puis après les croire » (p.141) |