8 Mars 2025
Bac : Nathalie Sarraute livre des personnages sans identité ; ils forment un archétype, ils ne sont pas un enjeu pour la pièce. L’auteure met en scène non une intrigue proprement dite, mais une architecture sémantique à partir de dialogues : seuls ces derniers font avancer l’action… la portée des mots est donc au cœur de la pièce.
Qu’est-ce que la dispute dans la pièce de Nathalie Sarraute met en scène ?
2. Un balancement continu :
3. Les intentions de l’auteure :
3.1 Le rôle du temps et de l’espace ;
3.3 L’argumentation de N. Sarraute ;
3.4 Les figures de style et les registres.
Nous assistons à une double lecture : une lecture concrète, qui se comprend dans le réel et une lecture abstraite faisant appel à un raisonnement intellectuel, spéculatif.
Cette pièce nous invite, en effet à découvrir :
– Ce qui est réellement dit,
– Ce qui est sous-jacent.
La Gazette a dressé un tableau récapitulatif que vous retrouverez à la fin de l’article.
Aujourd’hui, examinons le statut des personnages.
S’agissant du rôle des personnages, voyons la lecture de base que nous pouvons en faire avant de comprendre les enjeux souterrains.
a) une amitié remise en question
Nous avons d’un côté, deux personnages masculins (H1 et H2) qui entreprennent de questionner leur propre amitié nouée depuis des années. Ils vivent dans une certaine proximité partageant des souvenirs communs (l’épisode de la mère de H2, une excursion en montagne, une intimité familiale connue de l’un et de l’autre).
Au fil des mots, on apprend finalement peu de choses sur les personnages : ainsi le caractère flou enveloppe les protagonistes de l’action. On entraperçoit vaguement une opposition sociale entre les personnages : H1 qui aurait réussi, habitant dans une maison avec femme et enfant et H2, à l’inverse, serait vu comme « un marginal » (p.33) et demeurerait dans un simple appartement. Mais ces données ne sont pas au cœur de cette pièce.
D’un autre côté, nous avons deux personnages secondaires (H3 et F), des voisins de H2, appelés à les départager dans le conflit qui les divise. Quel conflit ? L’offense de H1 est-elle avérée ? Justifie-t-elle la rupture des liens ?
Découvrons ce qui est suggéré par l’auteure avec ses personnages.
b) des archétypes
Nathalie Sarraute dépasse cette lecture concrète, nécessaire pour la mise en scène, pour faire advenir en creux une lecture sous-jacente. Nous notons trois singularités.
Nous sommes loin des personnages supposés réels représentés habituellement par un nom (Argante), une fonction sociale (valet, etc.), etc. Ici, les personnages sont dénués de toute identité.
L’auteur les distingue seulement à l’aide de lettres et de chiffres : nous avons H1 H2 H3 et F. Cette économie de moyens dans la détermination des personnages est une originalité de la pièce. Rappelons que cette pièce a été conçue pour être écoutée à la radio...
Par ailleurs, notons l’autre caractéristique : aucun des protagonistes ne s’appelle ou ne se nomme. On dialogue à l’aide de pronoms personnels à la 2e personne (tu) et (vous) : cette pièce met ainsi en scène ces pronoms pour rendre paradoxalement opaque l’identité des personnages. Dans l’esprit de Nathalie Sarraute, ils constituent certainement des archétypes, mais surtout des prétextes à un enjeu dépassant une action conduite par des protagonistes comme dans le théâtre traditionnel.
L’auteure se focalise sur les dialogues, plus précisément sur le pouvoir des mots : seuls ces derniers mènent “l’intrigue”.
Il vous est proposé de parcourir le résumé de notre analyse dans ce premier tableau :
Théâtre/dispute |
Concret |
abstraction |
rôle des personnages |
vieux amis :
« tu te souviens comme on attendrissant ta mère ? »/Elle t’aimait bien » (p.23-24) Deux voisins H2 : « un marginal » (p.33) « Tournée de conférences… 3 (p.33) |
archétypes : tu/vous
anonymes,
identifiables (lettres et chiffres) : H1/H2 et — H3 — F |
Repère à suivre : l’action