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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

Acte II du "Menteur" de Corneille : analyse

Bac : Dans cet acte, qui se situe dans un nouveau décor (intérieur/extérieur), nous verrons deux procédés principaux, d'une part, la feinte mise en œuvre par Géronte qui le conduit à un mensonge, mais, d'autre part, le 3e mensonge de Dorante auquel on ajoute la feinte d’Isabelle. Ce sera aussi l'occasion de mesurer à ce stade de la pièce le dévoilement de la vérité.

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repère : le bac : Corneille

Plan

Découvrez une étude conforme au parcours mensonge/comédie sur le Menteur de Corneille selon la progression suivante :

Tableau

Nous voici désormais à l'acte II.

Comme vous le savez, la Gazette vous propose l'examen de chaque acte dans la perspective du parcours mensonge et comédie. Poursuivons notre étude à l'aide d'un tableau récapitulant les scènes de l'acte II, avant de découvrir l'analyse : pour cela, un code couleur est choisi pour vous aider à vous repérer : 

  • vérité

  • mensonge

  • quiproquo

  • artifice

Actes/ lieu/

personnages

2

place royale

plus tard dans l’après-midi


 

Dorante

refus du mariage  avec Clarice  au motif d'un mariage précédent (Sc 5). 

Extravagance : récit des circonstances du mariage avec Orphise : contre-emploi du code de l’honneur du héros cornélein.

Art du mensonge : “ que dis-tu de l'histoire, et de mon artifice? Sc 6, v 686) “Un trait de gentillesse” v 693

“Industrie” v 696

Annonce de sa venue chez Lucrèce La nuit (SC7 v. 710)

Acceptation du duel avec Alcippe (v.720) 

Clarice

Elle réclame de  voir la physionomie de Dorante (Sc1).

Pourtant elle doute sur la pertinence du jugement physique de celui qui sera son futur mari : 

“le dedans paraît mal en ces miroirs flatteurs “ (Sc 2 v.407) “Mais connaître dans l'âme” (v.423)

En attente du consentement depuis des années du père d'Alcippe (v429 )

Lucrèce

/

Cliton

recherche d'explication : “ quoi ce que vous disiez n'est pas vrai ? sc6 v 692

Alcippe

Querelle amoureuse avec Clarice (Sc3)

Proposition de mariage faite à Clarice qui n’y répond pas (Sc3)

projet de duel contre Dorante (Sc 4)

Philiste

/

Isabelle

ruse : faire écrire une lettre de rendez-vous secret par Lucrèce en attirant Dorante sous sa fenêtre sc2, vers 450 : poursuite du quiproquo

Géronte

Il souhaite voir Clarice épouser Dorante (Sc1) et propose de lui montrer la physionomie de son fils.

Projet de mariage  avec Clarice annoncé à Dorante (Sc 5)

Il projette d'emmener son fils sous les fenêtres de Clarice qui le voit tout comme Lucrèce (Didascalie sc 5)

il use d’un prétexte mensonger : 

“ Dorante, arrêtons-nous ; le trop de promenade/ Me mettrait hors d’haleine, et me ferait malade./que l'ordre est rare et beau de ces grands bâtiments »(v 551) 

Sabine

Porteuse d'un message de Lucrèce Sc 7 

Lycas

Porteur d'un message d’Alcippe sc 8

Analyse

À la différence de l'acte I, les différents procédés font se situer dans un autre lieu : la place royale, ex place des Vosges. Pourquoi ce changement de lieu parisien ? Il permet de conserver le décor extérieur, celui des conventions sociales tout en utilisant le logis des deux  jeunes filles, c'est-à-dire l'intérieur, pour assister aux manœuvres qui se forgent dans l’intimité des lieux clos. 

Dans cet acte, nous verrons deux procédés, d'une part, la feinte mise en œuvre par le père de Dorante, Géronte, qui le conduit à un mensonge, mais, d'autre part, le 3e mensonge de Dorante outre la feinte d’Isabelle. Ce sera aussi l'occasion de mesurer, à ce stade de la pièce, le dévoilement de la vérité.

Père

Nous avons vu que la scène exposition contrairement à la comédie du valet ne reprend pas la problématique du mariage forcé. Ce point n'apparaît que dans l’acte II et dans deux scènes (scène 1 et la scène 5).

L'originalité de ce projet de noces réside dans le fait qu'il est présenté d'abord à la jeune fille, en l'occurrence Clarice. Il s'agit pour le père de convaincre sa future belle-fille d'épouser son fils dont il fait un pur éloge, mais uniquement physique : « Examiner sa taille, et sa mine et son air » (vers 391). Il entre de ce fait dans le grand aveuglement général des affaires de l’amour basées sur la seule apparence. C’est ce qui présente un caractère comique, puisque contraire à la raison.

On rappelle que dans la littérature de l’époque, les parents ne sont pas réputés pour leur particulière tendresse et décident autoritairement du mariage de leurs enfants, ce qui constitue toujours la base de l’intrigue dans la comédie. Ici, nous sommes en présence d’un futur beau-père tendre qui cherche à gagner le cœur de Clarice. Nous verrons plus tard son désir égoïste de descendance qui le conduit à vouloir marier de manière autoritaire son fils. « je veux qu'un petit-fils puisse y tenir ton rang,/ Soutenir ma vieillesse virgule et réparer mon sang : «  (scène 5, vers 588).

Pour décider Clarice tout à fait, il lui propose de faire venir Dorante sous ses fenêtres pour qu’elle puisse juger sur pièce. Le père entreprend donc de montrer la physionomie de son fils comme une vulgaire bête au marché. Dans cette pièce, Corneille joue sur les codes habituels en faisant jouer au père un rôle conciliant d'une part, mais paradoxalement trompeur, d'autre part, puisqu'il cache la manœuvre à son fils au début de la scène 5 :

« Dorante, arrêtons-nous ; le trop de promenade/ Me mettrait hors d’haleine, et me ferait malade./Que l'ordre est rare et beau de ces grands bâtiments » ( v 551). Il s'agit donc bien d’une tromperie du père à l’égard de son fils. Cette situation aura pour effet de permettre aux deux jeunes filles de reconnaître en Dorante le jeune galant du début de l’après-midi. Notons le caractère de ce mensonge qui prend l'allure d'une véritable manipulation, ce qui distingue la manœuvre du père des affabulations du fils.

Fils

Devant cette situation, Dorante est acculé aux mensonges. Il indique qu’il est déjà marié secrètement. C'est la première fois que la vérité est travestie à titre d’élément défensif. Corneille joue donc sur les oppositions à la fois entre le père et le fils et également entre les niveaux de tromperie.

Les deux derniers mensonges étaient motivés par le goût de se mettre en valeur. Là, au contraire, il choisit un argument qui le dessert. Notons l'opposition entre l'aveu du mariage secret et la reprise en main du discours sous l'angle de l'extravagance. Il faut dire que son père l’encourage sans le savoir « Mais poursuis » (vers 605). Corneille joue sur le contraste entre les vers : un seul vers donc très court pour l’aveu (vers 564) et deux longues tirades de Dorante lorsqu'il évoque en détail les circonstances du mariage avec Orphise (vers 606 et suiv. et 665 et suiv.). Il s’agit pour Corneille de s’amuser à détourner les codes de l’exploit chevaleresque :

-          le héros reconnaît s’être introduit frauduleusement chez sa bien-aimée la compromettant ainsi.

-          Le déshonneur a entraîné le mariage forcé.

Loin d’un récit héroïque, Dorante brode un récit où règne le déshonneur. Pour les beaux-yeux de Clarice, l’imagination débordante de Dorante sert, cette fois, à le perdre dans l’esprit de son père. En réalité, il prend goût à cette fiction même désavantageuse. On est dans une scène de contre-emploi complet du héros cornélien.

Loin de voir attirer sur lui le courroux, le fils rend son père content, détournement d’une situation en vérité dramatique dans l’esprit de son temps. Il s’agit là encore d’un procédé comique. Avec cette scène, on entre véritablement dans l'art du mensonge : à la scène 6, Dorante se glorifie son exploit en parlant de « trait de gentillesse » v 693 et d’« industrie » v 696.

Isabelle

Il faut aussi évoquer l'intervention d'Isabelle, la suivante de Clarice dont c'est la première intervention dans la pièce.

Elle organise une ruse destinée à permettre à sa maîtresse de connaître la personnalité réelle de celui qu'on veut lui faire épouser ( v 450) : il s'agit de demander à Lucrèce de rédiger une lettre pour attirer Dorante auprès de Clarice, qui poursuit sans le savoir le quiproquo du départ.

Vérité

Dans cet acte, le chemin de la vérité est encombré par les feintes et les mensonges des personnages. Voyons dans un prochain article l'avancée de l'intrigue à l'acte III.

 repère à suivre : compréhension de l'acte III

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