Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

Bac 2024 : deux sujets donnés de commentaire composé (Musset- Gary)

Dernier entraînement avec les deux sujets de commentaire donnés dans des centres étrangers : le premier concerne une pièce de théâtre de Musset, Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée (1845). Le deuxième entre, pour sa part, dans le genre romanesque avec Les Cerfs-volants de Romain GARY. Lisez ces textes et travaillez vos compétences à l'aide de la to-do list prévue à cet effet avant de découvrir, durant la semaine, l'analyse et le plan de la Gazette.  À vos crayons !

bac 2024, épreuve anticipée, francais

 

repères : temps des examens : sujets corrigés

Dernier entraînement

La Gazette vous a proposé durant l'année des entraînements que vous pouvez retrouver aisément.

Nous voici arrivés au temps des examens : les premiers sujets des centres étrangers viennent de tomber.

Voici deux sujets de commentaire composé tirés des œuvres suivantes :

Durant toute cette semaine, il vous sera proposé un dernier entraînement sur ces deux sujets pour que vous soyez à l'aise le jour de l'examen.

Il vous est demandé de vous reporter à la to-do list  avant de colorier les deux textes selon la méthode des GROSSES CLEFS © et avant que vous ne vous lanciez dans le plan type CIIGARE.

Par ailleurs, relisez les fiches de révision :

Musset

Le comte et la marquise se connaissent bien. Il est venu lui rendre visite, alors qu'elle attend des amis. Il a quelque chose à lui dire…

"(...)

Le comte.

Vous riez de tout ; mais, sincèrement, serait-il possible que, depuis un an, vous voyant presque tous les jours, faite comme vous êtes, avec votre esprit, votre grâce et votre beauté…

La marquise.

Mais mon Dieu ! c’est bien pis qu’une phrase, c’est une déclaration que vous me faites là. Avertissez au moins : est-ce une déclaration, ou un compliment de bonne année ?

Le comte.

Et si c’était une déclaration ?

La marquise.

Oh ! c’est que je n’en veux pas ce matin. Je vous ai dit que j’allais au bal, je suis exposée à en entendre ce soir ; ma santé ne me permet pas ces choses-là deux fois par jour.

Le comte.

En vérité, vous êtes décourageante, et je me réjouirai de bon cœur quand vous y serez prise à votre tour.

La marquise.

Moi aussi, je m’en réjouirai. Je vous jure qu’il y a des instants où je donnerais de grosses sommes pour avoir seulement un petit chagrin. Tenez, j’étais comme cela pendant qu’on me coiffait, pas plus tard que tout à l’heure. Je poussais des soupirs à me fendre l’âme, de désespoir de ne penser à rien.

Le comte.

Raillez, raillez ! Vous y viendrez.

La marquise.

C’est bien possible ; nous sommes tous mortels. Si je suis raisonnable, à qui la faute ? Je vous assure que je ne me défends pas.

Le comte.

Vous ne voulez pas qu’on vous fasse la cour ?

La marquise.

Non. Je suis très bonne personne, mais quant à cela, c’est par trop bête. Dites-moi un peu, vous qui avez le sens commun, qu’est-ce que signifie cette chose-là : faire la cour à une femme ?

Le comte.

Cela signifie que cette femme vous plaît, et qu’on est bien aise de le lui dire.

La marquise.

À la bonne heure ; mais cette femme, cela lui plaît-il, à elle, de vous plaire ? Vous me trouvez jolie, je suppose, et cela vous amuse de m’en faire part. Eh bien, après ? Qu’est-ce que cela prouve ? Est-ce une raison pour que je vous aime ? J’imagine que, si quelqu’un me plaît, ce n’est pas parce que je suis jolie. Qu’y gagne-t-il à ces compliments ? La belle manière de se faire aimer que de venir se planter devant une femme avec un lorgnon, de la regarder des pieds à la tête, comme une poupée dans un étalage, et de lui dire bien agréablement : Madame, je vous trouve charmante ! Joignez à cela quelques phrases bien fades, un tour de valse et un bouquet, voilà pourtant ce qu’on appelle faire sa cour. Fi donc ! Comment un homme d’esprit peut-il prendre goût à ces niaiseries-là ? Cela me met en colère, quand j’y pense.

Le comte.

Il n’y a pourtant pas de quoi se fâcher.

La marquise.

Ma foi, si. Il faut supposer à une femme une tête bien vide et un grand fonds de sottise, pour se figurer qu’on la charme avec de pareils ingrédients. Croyez-vous que ce soit bien divertissant de passer sa vie au milieu d’un déluge de fadaises, et d’avoir du matin au soir les oreilles pleines de balivernes ? Il me semble, en vérité, que, si j’étais homme et si je voyais une jolie femme, je me dirais : Voilà une pauvre créature qui doit être bien assommée de compliments. Je l’épargnerais, j’aurais pitié d’elle, et, si je voulais essayer de lui plaire, je lui ferais l’honneur de lui parler d’autre chose que de son malheureux visage. Mais non, toujours : Vous êtes jolie, et puis : Vous êtes jolie, et encore jolie. Eh, mon Dieu ! on le sait bien. Voulez-vous que je vous dise ? vous autres hommes à la mode, vous n’êtes que des confiseurs déguisés.

Le comte.

Eh bien ! madame, vous êtes charmante, prenez-le comme vous voudrez.

On entend la sonnette.

On sonne de nouveau ; adieu, je me sauve.

Il se lève et ouvre la porte. (...)"

 

Alfred de Musset, Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée (1845)

https://fr.wikisource.org/wiki/Il_faut_qu%E2%80%99une_porte_soit_ouverte_ou_ferm%C3%A9e_(Charpentier,_1888)

 

Romain Gary

Lorsqu'il avait dix ans, alors qu'il jouait dans les environs de la ferme où il vit, le narrateur a rencontré une jeune fille dont il est immédiatement tombé amoureux : Elisabeth de Bronicka, surnommée Lila, en vacances dans une maison de famille. Quatre années plus tard, il est invité chez elle; l'extrait s'ouvre au moment où, après ces retrouvailles, il rentre chez lui.

    "Je rentrai chez moi résolu à devenir “quelqu'un”, et ce dans les plus brefs délais, de préférence avant le départ de mes nouveaux amis (1), ce qui se traduisit par une forte fièvre : je dus garder le lit pendant plusieurs jours. Au cours de mon délire, je découvris en moi le pouvoir de conquérir les galaxies et recueillis des lèvres de Lila un baiser en guise de re- merciement. Je me souviens qu'au retour d'une planète particulièrement hostile, après une expédition au cours de laquelle j'avais fait cent mille prisonniers nubiens(2) - j'ignorais le sens du mot nubien, mais il me paraissait convenir admirablement à ces prédateurs interstellaires- j'avais revêtu, afin d'offrir mon nouveau royaume en hommage à Lila, un costume si chargé de pierreries, qu'il y eut soudain parmi les plus brillantes étoiles une véritable panique, à la vue de cet intense rayonnement qui montait d'une terre n'ayant tenu jusque-là qu'une place très modeste parmi les années-lumière.

Ma maladie prit fin de la plus douce des façons. Il faisait très sombre dans ma chambre ; les volets étaient fermés, les rideaux tirés, car on craignait que la rougeole (3) ne se déclarât brutalement après ces quelques jours d'hésitation et, à cette époque, un des aspects du traitement était de garder le malade dans le noir, afin de protéger ses yeux. Le docteur Gardieu se montrait d'autant plus inquiet que j'avais déjà quatorze ans et la rougeole avait du retard. Il devait être midi, à en juger par la lumière qui s'engouffra dans la chambre lorsque la porte s'ouvrit et Lila apparut, suivie par le chauffeur, Mr. Jones, les bras chargés d'une énorme corbeille de fruits ; derrière elle venait mon oncle, qui ne cessait de mettre en garde Mademoiselle contre le risque de fatale contagion. Lila resta un moment à la porte et, malgré mon extrême émoi (4), je ne pus m'empêcher de sentir ce qu'il y avait de prémédité dans cette pose qu'elle gardait sur fond de clarté, jouant d'une main avec sa chevelure. S'il s'agissait bien de moi dans cette visite, il y avait là avant tout un moment théâtral, celui d'une jeune fille amoureuse qui vient se pencher sur le lit d'un mourant, ce qui, sans exclure  réellement l'amour et la mort, les faisait néanmoins passer au rang d'accessoires. Pendant que le chauffeur déposait sur la table la corbeille de fruits exotiques, Lila garda encore quelques instants sa pose, puis traversa vivement la chambre, vint se pencher sur moi et m'effleura la joue d'un baiser, cependant que mon oncle rappelait une fois de plus à Made- moiselle la puissance saisissante et néfaste des microbes dont mon corps était peut-être chargé.

- Tu ne vas quand même pas mourir de maladie ? me demanda-t-elle, comme si elle attendait de moi quelque tout autre et admirable façon de quitter la terre.

-Ne me touche pas, tu vas peut-être l'attraper.

Elle s'assit sur le lit.

- À quoi ça sert d'aimer quelqu'un, si on a peur de l'attraper ?

Une vague de bonne chaleur me monta à la tête.”

Romain GARY [1914-1980], Les Cerfs-volants, Chapitre VI, 1980.

______________

1. mes nouveaux amis : le narrateur désigne ainsi la famille de Lila qu'il vient de rencontrer.

2. nubiens: peuple d'Afrique du Nord-Est.

3. rougeole: maladie infantile potentiellement mortelle, que l'on craignait particulièrement avant la généralisation de la vaccination.

4. émoi : émotion vive, trouble, agitation.

 

repère à suivre : 

analyse méthodique de Musset et plan

entraînement Gary (en cours)

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article