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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

L’enjeu de la métaphore du rossignol dans "les vrilles de la vigne" (Colette)

Le premier texte de Colette les vrilles de la vigne qui donne son titre à l’ouvrage met en scène un rossignol, objet d'une métaphore filée, avant de relier son chant à une perception sensorielle de l'auteure qui aborde la question de la création littéraire.  
 

rossignol, les vrilles de la vigne, colette, analyse, métaphore

 

repère : bac : analyse

Dossier

Dans le cadre de notre dossier consacré à Colette, nous vous proposons une présentation et une analyse de l'œuvre selon la progression suivante : 

1.présentation des œuvres :

2.analyse linéaire des passages suivants :

  • le rôle d’initiatrice de la mère : analyse du passage : “« Sido » répugnait à toute hécatombe de fleurs. … je me taisais, jalouse…” (Sido)
  • le jardin d’Éden : “Dans mon quartier natal, on n’eût pas compté vingt maisons privées de jardin…(Sido)
  • la conscience de soi : analyse du passage le Miroir dans les vrilles de la vigne : “Quoi, vous prétendez  n’avoir jamais été petite…la fin.
  • L'enjeu poétique : le rossignol : “Autrefois, le rossignol ne chantait pas la nuit” ...la fin (Les vrilles de la vigne).

Analyse

Ce dernier texte illustre le travail de l’écrivain qui évoque la légende du rossignol, constituant une métaphore et un prétexte pour évoquer le travail de l’écriture. Ainsi trois grandes parties de dessinent :

1. l’origine du chant nocturne du rossignol (NB : terme anglais "nightingale" soit le soir night et gale en vieil anglais : le chant),

2. un spectacle musical,

3. l’éveil poétique  

/Autrefois, le rossignol ne chantait pas la nuit. Il avait un gentil filet de voix et s’en servaitavec adresse du matin au soir, le printemps venu. Il se levait avec les camarades, dans l’aube grise et bleue, et leur éveil effarouché secouait les hannetons endormis à l’enversdes feuilles de lilas.

Il se couchait sur le coup de sept heures, sept heures et demie, n’importe où, souventdans les vignes en fleur qui sentent le réséda, et ne faisait qu’un somme jusqu’au lendemain.

Une nuit de printemps, le rossignol dormait debout sur un jeune sarment, le jabot en boule et la tête inclinée, comme avec un gracieux torticolis. Pendant son sommeil, les cornes de la vigne, ces vrilles cassantes et tenaces, dont l’acidité d’oseille fraîche irrite et désaltère, les vrilles de la vigne poussèrent si dru, cette nuit-là, que le rossignol s’éveilla ligoté, les pattesempêtrées de liens fourchus, les ailes impuissantes

Il crut mourir, se débattit, ne sévada qu’au prix de mille peines, et de tout le printemps se jura de ne plus dormir, tant que les vrilles de la vigne pousseraient.

 Dès la nuit suivante, il chanta, pour se tenir éveillé :

Tant que la vigne pousse, pousse, pousse

Je ne dormirai plus !

Tant que la vigne pousse, pousse, pousse

 

Il varia son thème, l’enguirlanda de vocalises, s’éprit de sa voix, devint ce chanteur éperdu, enivré et haletant, qu’on écoute avec le désir insupportable de le voir chanter./

/Jai vu chanter un rossignol sous la lune, un rossignol libre et qui ne se savait pas épié. Il s’interrompt parfois, le col penché, comme pour écouter en lui le prolongement d’une note éteinte Puis il reprend de toute sa force, gonflé, la gorge renversée, avec un air d’amoureuxdésespoir. Il chante pour chanter, il chante de si belles choses qu’il ne sait plus ce qu’elles veulent dire. Mais moi, j’entends encore à travers les notes d’or, les sons de flûte grave, les trilles tremblés et cristallins, les cris purs et vigoureux, j’entends encore le premier chant naïf et effrayé du rossignol pris aux vrilles de la vigne :

Tant que la vigne pousse, pousse, pousse…/

/Cassantes, tenaces, les vrilles d’une vigne amère mavaient liée, tandis que dans mon printemps je dormais d’un somme heureux et sans défiance. Mais j’ai rompu, d’un sursauteffrayé, tous ces fils tors qui déjà tenaient à ma chair, et j’ai fui… Quand la torpeur d’une nouvelle nuit de miel a pesé sur mes paupières, j’ai craint les vrilles de la vigne et j’ai jeté tout haut une plainte qui m’a révélé ma voix.

Toute seule, éveillée dans la nuit, je regarde à présent monter devant moi l’astre voluptueux et morosePour me défendre de retomber dans l’heureux sommeil, dans le printemps menteur fleurit la vigne crochue, j’écoute le son de ma voix. Parfois, je crie fiévreusement ce qu’on a coutume de taire, ce qui se chuchote très bas, – puis ma voix languit jusqu’au murmure parce que je n’ose poursuivre…

Je voudrais dire, dire, dire tout ce que je sais, tout ce que je pense, tout ce que je devine, tout ce qui m’enchante et me blesse et m’étonne ; mais il y a toujours, vers l’aubede cette nuit sonore, une sage main fraîche qui se pose sur ma bouche, et mon cri, quis’exaltait, redescend au verbiage modéré, à la volubilité de l’enfant qui parle haut pour se rassurer et s’étourdir

Je ne connais plus le somme heureux, mais je ne crains plus les vrilles de la vigne./

 Il vous sera proposé de trouver l’analyse en un tableau synthétique qui relève ce que nous avions relevé dans les autres analyses. 

  1. L’origine du chant nocturne du rossignol

Clefs d’analyse

illustrations

procédés de style

le cadre spatio- temporel

partout/dans les vignes 



 

matin au soir, 

aube.

sept heures, sept heures et demie,

lendemain/souvent/

 

la saison du printemps mise en relief : un printemps, de tout le printemps 

Vision générale dans le lieu indéfini qui se resserre dans le particulier avec la vigne : lieu clos

 

Vision générale dans le temps avec adverbes de temps, répétés, des oppositions 


 

 

 

répétitions nombreuses du terme

 

effets recherchés :  accentuation et contraste

le végétal


 

à l'envers des feuillesde lilas./sur un jeune sarment,

dans les vignes en fleur

 

les vrilles de la vigne cassantes et tenaces

 

oseille

le réséda

Description minutieuse de la végétation à l’aide 

d’adverbes de situation(dessus, dessous) et de préposition (dans) inclusive. 

 

 

d'adjectifs qualificatifs qui s'opposent : fragilité/force

 

de noms : comparaison oseille/vrille

réséda/vrille

 

effets recherchés

On a une nature très organisée, colorée (vert des feuilles et de l’oseille, mauve du lilas, jaune du réséda et de la fleur de vigne).

effets de contraste

l’animal

le rossignol/  les hannetons








 

 

Une nuit de printemps, le rossignol 

le corps de l’oiseau jabot/tête/pâtes/ailes

Utilisation du déterminant défini sing /pluriel : l’auteure évoque l’espèce en général

 

Parallèle entre ces 2 espèces volantes.

opposition de tailles grand/petit (oiseau/insecte) 

c’est le rossignol, avec le même déterminant défini mais pas le même sens : le sujet de la légende  : l’espèce en elle-même est en train d’évoluer. 

 

effets recherchés : contraste

Métamorphoses

verbes :/s’en servait/se levait/Il crut mourir/se jura/se tenir éveillé/s’éprit

 

adjectifs : gentil/effarouchés/éperdu,

enivré et haletant, 

 

noms : torticolis/ chanteur

paroles du rossignolTant que la vignepousse, pousse, pousseJe ne dormirai plus !



 

nom : les cornes de la vrilles

adjectif : tenaces et cassantes

Personnification de l’animal : vision anthropocentrique.

Enchantement  du monde naturel

 

effets recherchés :

importance du dynamisme de la vie, du mouvement,

 

 

 

gradation : le rossignol qui devient progressivement un homme





 

Animalisation du végétal 

 

effets recherchés : le végétal est en plein mouvement.

Conjugaison









 

chantait/avait/s’en servait.

 

 

 

les vignes en fleurqui sentent leréséda, 

dont l’acidité d’oseille fraîche irrite et désaltère

 

Il crut mourir/se jura/

l’imparfait : 

effets recherchés : valeur de l’habitude

 

présent : 

effets recherchés : vérité générale


 

 

passé simple : rupture action soudaine

les sens

ouïe : voix/vocalises, écoute/

 

vue : couleurs des plantes de l’aube grise et bleue,

 

odorat : sentent le réséda

 

goût : l’acidité d’oseille fraîche

 

toucher : les liens, ligotés

présence des 5 sens 

 

effets recherchés : vision sensorielle exubérante, fête des sens : harmonie de la nature et de l’animal qui est généreuse

les registres

choix du rossignol : 








 

choix de la vigne : 


 

choix d’insérer un court poème 

 

Tant que la vigne pousse, pousse, pousse



 

choix d’opposer chanter/dormir :

Je ne dormirai plus !

Tant que la vigne pousse, 

débattit/

impuissantes/

irrite /

 

cassantes/ 

ligotés/

fourchus (diable)/

cru mourir/

ne plus dormir /

désir insupportable

lyrique

symbole du printemps compris comme la saison du renouveau, de l’éveil, de la jeunesse,de la création,et de l’exaltation amoureuse 

 

symbole du vin et donc épicurien, de la vie entière

 

mise en abyme dans un texte poétique.

 

 

rythme ternaire 






vivre/mourir

épique : 

combat de la vie (chant) contre la mort menaçante (sommeil) 


 

 


 

tragique : la mort, la fin

dernier oxymore pour signifier la brûlure de la vie, passion dévastatrice. 

2. un spectacle musical

 

Clefs d’analyse

illustrations

procédés de style

le cadre spatio-temporel 

la lune

le choix de la nuit

l'animal

un rossignol/ du rossignol pris aux vrilles de la vigne :

 





gorge, col,


 

qui ne se savait pas épié.





 

Il chante pour chanter,

déterminant indéfini : un parmi d’autres opposition avec le rossignol vu précédemment 




 

référence au corps : organes de la voix

 

proposition relative avec une négation pour signifier paradoxalement une  affirmation : aspect naturel de l’oiseau, centré sur lui-même (sans artifice). pas d’autrui

 

pléonasme pour montrer que l’animal vit dans l’instant, sans arrière-pensées comme chez les humains

métamorphose

“libre”

 

en lui

 

sa force

 

comme pour écouter le prolongement d’une note éteinte/un aird’amoureux/note d’or /flûte/trilles/premier chant

 

il chante de si belles choses qu’il ne sait plus ce qu’elles veulent dire.


 

attribut humain 

 

introspection humaine

 

attribut humain

 

Comparaison avec un être humain et champ lexical de la musique. 




 

antithèse entre aspect mélioratif voie affirmative et l’aspect péjoratif à la voix négative : prêter à l’oiseau la mémoire

l’humain

je, moi

 

le sens de l'ouïe et de la vue : 

Jai vu chanter 

répétition et redondance

écouter/entendre/chanter/

notes d’or

 

mais moi, j’entends encore : répétés par anaphore

 

le premier chant naïf

sujet qui est le conteur de la légende.

 

spectacle visuel et auditif

 

 

Le sens musical est en éveil :



 

je en opposition avec l’ignorance du rossignol. Redondance de la tournure personnelle moi/je l'anaphore : narrateur est l’unique témoin de la genèse de la légende

la conjugaison

j’ai vu


 

Il s’interrompt/Il reprend/Il chante/j’entends

passé composé : action qui vient de se passer : souvenir proche.

 

présent de narration : action prise sur le vif,mais qui a une valeur d’habitude

les registres


 

la lune,


 

amoureux,



 

j’entends encore le premier chant

 

Tant que la vigne pousse, pousse, pousse…


 

 

 

amoureux désespoir/

éteinte/renversée/

graves/tremblés/

effrayé/pris

registre lyrique

 

La nuit, moment poétique par excellence.

  

Thème de l’amour

Influence du romantisme 

 

anaphore : procédé de répétition : musicalité 

 

 poème mis en abyme




 

registre tragique

champ lexical de la mort : la finitude de la beauté qui passe.

Influence épicuriste

 

3. l’éveil poétique 

Clefs d’analyse

Illustrations

Procédés de style

Le cadre spatio-temporel

l’astre

la nuit/l’aube

printemps

la vigne

 

reprise du cadre du début du poème : unité du texte.

Le végétal

les vrilles de la vigne  


 

cassantes, tenaces” 

 

j’ai craint les vrilles  de la vigne

 

 

je ne crains plus les vrilles de la ville : fin du texte

 

métaphore reprise :

 

reprises de l’opposition fragilité/force. 

 

tournure affirmative : peur, menace de la nature

 

tournure négative pour dire une affirmation : cette fois, la nature est appropriée avec le verbe “craindre”

L’humain

je

liée/éveillée



sommeil/éveillée





fiévreusement

 

chair/paupières/main

bouche/voix

 


 

je/ma voix/enfant


 

Toute seule/“lune de miel” “une main”

 

passage du je indifférencié au genre féminin : participes passés exprimant des actions subies.

Besoinsphysiologiques : le sommeil, métaphore de la vie subie

état physiologique

 

rôle du corps  : expérience charnelle  dans la métamorphose



introspection du moi: rapport de l’auteur avec sa création, rôle de l’enfance

moi/autrui : éléments autobiographiques voilés (mariage avec Willy) mais qui évoquent de manière générale la compréhension par autrui de l’œuvre. 

métamorphose

la femme est comme le rossignol

 

1. somme heureux et sans défiance/ sommeil heureux/je dormais

 

2. j’ai rompu/j’ai fui/j’ai jeté 


3.je regarde/j’écoute/ je crie

 retomber/

printemps mensonger

4.dire, dire, dire


 

 

 

tout ce que

5.je n’ose poursuivre/la main qui se pose sur ma bouche

métaphore reprise transformation progressive : passage

1.d’un état l’innocence 

 

2.à une lutte : verbes de mouvement :

 3.état d’inquiétude permanente, sur le vif et sur le fil

prise de conscience de l’aliénation, fausseté de la vie

 4. hymne à la création : répétition du verbe qui résonne comme l’oiseau : vibration de la langue

 

anaphore :ressources immenses 

5. limites de la création : le mensonge comme travail de la poésie sur le monde approprié. poète est un intermédiaire entre la réalité et la retranscription du monde

 

les sens

4 sens :

1.le goût : amère

2.le toucher : j’ai rompu/j’ai jeté

3.l'ouïe : ma voix

4.la vue : je regarde

 

l'ouïe/le toucher

cri/chuchotement/

murmure


une “main” qui fait taire

reprise de tous les sens sauf l’odorat : associé à une situation de béatitude

Gradation dans la perception : lutte pour la liberté créatrice qui se joue.

 gradation de sons du fort à l’inaudible : des choses impossibles à dire dans la création.

 

création comporte par déterminant indéfini : action concerne le geste et moins la personne. Il s’agit de la faire taire : création littéraire comporte des éléments insaisissables.Geste aussi amoureux

 

 

La conjugaison

 

plus-que-parfait m’avaient liée

 

 

imparfait : je dormais/tenaient

passé composé : j’ai rompu/j’ai jeté/j’ai craint

 

 

présent : je regarde/j’écoute/je crie

 

conditionnel : je voudrais

 

action passée : accentuation sur le caractère ancien de l’aliénation (caractère autobiographique)

valeur de l’habitude et donc de la durée dans le passé

action qui vient de se passer : vitalité du mouvement rendu, dynamisme accentué

 valeur de l’habitude, rythme ternaire

 

valeur de l’impossibilité 

 

Les registres

 

 

1.cadre spatio-temporel

somme/ sommeil/dormais/dormais 

lune de miel/ voluptueux/

une main/heureux

 

2.plainte/a pesé/






2.j’ai rompu/sursaut/

tous ces fils/ j’ai fui/j’ai jeté/ tout haut 

4.révélé ma voix

je regarde/j’écoute/je crie/voluptueux, enchante/

languir,chuchote/

s’exalte/s’étourdir

5. retomber, printemps menteur/

amère/morose

crochue (diable)/blesse

Je ne connais plus le somme heureux,

 

 

6.mais je ne crains plus les vrilles de la vigne

 

combinaison des registres 

1.lyrique : 

éléments du courant du romantisme,sommeil  : innocence de la vie/ l’amour



 

2. élégiaque : douleur



3. épique : lutte pour devenir soi

 

4. retour au lyrique mêlé : amour






 

 

5. pathétique, et tragique : combinaison de la souffrance et de la mort







6. lyrique :courage, obstination, liberté qui a un prix, 

 

 

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