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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

L’organisation pyramidale de la société (La Bruyère)

Parcours Comédie sociale Les Caractères La Bruyère ont la particularité de montrer un monde  pyramidal avec à sa tête le souverain et à sa base, le peuple. Entre ces deux extrémités se trouvent les classes intermédiaires, à savoir la noblesse et la bourgeoisie qui seront objets de la critique du moraliste.

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Louis XIV devant la grotte de Téthys, Anonyme

 

repère : la comédie sociale : étude

Dans l’article précédent, nous avons donné quelques repères biographiques sur la vie de La  Bruyère, avant de nous intéresser à la question de la signature de son œuvre. 

Il vous est proposé dans le cadre du baccalauréat d’étudier les livres V à XI des Caractères de La Bruyère au vu du parcours proposé par les programmes officiels. Il sera, en effet, question d’aborder cette immense œuvre en soulignant le sens et la portée de la comédie sociale qu’elle sous-tend. 

Dans cette seconde partie de notre dossier, nous vous proposerons une étude consacrée à la théâtralisation de la société du XVIIe siècle telle qu’elle est vue par La Bruyère. Pour ce faire, nous analyserons les points suivants :

Ordres

Nous analyserons aujourd’hui la vision pyramidale que l’auteur se fait du monde. Rappelons que nous sommes dans une société qui comprend les trois ordres suivants :

  • La noblesse,
  • Le clergé,
  • Le tiers état (bourgeoisie et le peuple)

Pour  voir comment La Bruyère conçoit la société de son temps, il convient de nous intéresser à la structure interne de son œuvre.

Il faut se reporter à la table des matières du livre pour se donner une vue d’ensemble du monde tel qu’il le conçoit.

Des Ouvrages de l’Esprit

Du Mérite Personnel

Des Femmes

Du Cœur

De la Société et de la Conversation

Des Biens de Fortune

De la Ville

De la Cour

Des Grands

Du souverain ou de la République

De l’Homme

Des Jugements

De la Mode

De quelques Usages

De la Chaire

Des Esprits Forts

On voit que l’auteur ne raisonne pas en fonction des trois ordres. Il ne consacre pas de chapitres particuliers au tiers état et au clergé.

Noblesse et bourgeoisie

À la lecture de la table des matières, on peut estimer que La Bruyère réserve son argumentation à ceux qui détiennent pouvoir et fortune et pour qui tout est faux semblant. L’essentiel de son livre concerne, en effet, les personnages importants de la cour (cf. la cour, les grands, les usages, les jugements, la mode, les femmes etc…) mais pas seulement puisque la puissance de son analyse couvre aussi les travers de la vie de province dans ces villes où la petite noblesse et de la bourgeoisie singent Versailles.

Ainsi les petites villes imitent les grandes qui elles-mêmes copient les us et coutumes de la cour.

L’écrivain ne traite que dans un seul chapitre du souverain et donc du roi, ce qui se comprend lorsqu’on comprend la philosophie politique de l’auteur et sa prudence.

Il faut lire l’ouvrage pour considérer les quelques passages concernant le clergé qui est au demeurant fort peu attaqué. Là encore, ce n’est pas la cible de l’auteur.

Peuple

Reste le peuple qui semble le grand absent des préoccupations de l’auteur si l’on en juge la table des matières. Et pourtant, il en est clairement question. Il critique ainsi les collecteurs d’impôts cupides et véreux. L’auteur dénonce aussi la voracité des riches qui n’ont aucun égard pour les pauvres.  On peut mentionner le vibrant plaidoyer de La Bruyère pour la défense des plus fragiles.

Il conclut avec une formule lapidaire :

 «25

(…) Le peuple n’a guère d’esprit, et les grands n’ont point d’âme : celui-là a un bon fond, et n’a point de dehors ; ceux-ci n’ont que des dehors et qu’une simple superficie. Faut-il opter ? Je ne balance pas : je veux être peuple.»

La Bruyère, les Caractères, les Grands

Quelle est donc sa vision de la société ?

Pyramide

Les Caractères ont la particularité de montrer un monde  pyramidal avec à sa tête le souverain et à sa base, le peuple.

Entre ces deux extrémités, on trouve les groupes intermédiaires, à savoir la noblesse et la bourgeoisie qui vivent en province ou à la Cour. C’est ce monde qui intéresse particulièrement La Bruyère pour les raisons suivantes :

  • Ce sont des milieux qu’il connaît pour les avoir côtoyés personnellement,
  • Ce sont des classes qui sont obsédées par la naissance et la fortune ; le comportement de ces personnages immoraux sont régis par l’intérêt : tout n’est affaire que de calcul et de faux semblant.

La Bruyère montre bien que la position occupée dans la société est tout à fait relative : on peut être, en effet, plus grand qu’un autre et dans le même temps on peut être l'inférieur d’une personne mieux née. De cette constatation naissent des comportements codifiés qui sont liés au seul positionnement social :

«  Les hommes d’ailleurs, qui tous savent le fort et le faible les uns des autres, agissent aussi réciproquement comme ils croient le devoir faire, connaissent ceux qui leur sont égaux, sentent la supériorité que quelques-uns ont sur eux, et celle qu’ils ont sur quelques autres ; et de là naissent entre eux ou la familiarité, ou le respect et la déférence, ou la fierté et le mépris. »

La Bruyère, les Caractères, De l’homme

L’auteur va donc s’employer à tourner en dérision la course aux honneurs et aux privilèges dans ce qui s'apparente bien à une comédie sociale. Dans l’article suivant, nous pénétrerons dans le milieu de la courtisanerie.

Sources : Doris Kirsch, La Bruyère ou le style cruel, Les Presses de l’Université de Montréal (1977)

Jean-Michel Delacomptée, La Bruyère, portrait de nous-mêmes, Robert Lafon (2019)

Repère à suivre : la cour vue comme un théâtre

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