Analyse-Livres & Culture pour tous
25 Novembre 2020
Balzac a choisi de faire réapparaître certains de ses personnages dans plusieurs de ses romans : Rastignac, Derville, Bianchon, madame de Maufrigneuse-Cadigan, madame d’Espard, madame de Sérizy etc…
Repères : la Comédie humaine : analyse
Dans l’article précédent, nous avons évoqué les différents types de personnages au regard de la problématique au cœur de ce hors-série : en quoi, la Comédie humaine, basée sur un système conçu et exécuté par Balzac, constitue-t-elle une œuvre annonciatrice du mouvement réaliste ?
Aujourd’hui, nous verrons la question de la récurrence des personnages.
Balzac a choisi de faire réapparaître certains de ses personnages dans plusieurs de ses romans. Avec une certaine habileté, on les voit vieillir au fil du temps et occuper des positions affirmées dans la société.
Ces êtres tissent leur toile dans la littérature de système mise en place par Balzac.
Ils peuvent jouer des rôles de premier plan ou figurer en arrière-fond.
Ces personnages aux traits physiques et moraux brossés avec soin par Balzac sont teintés de réalisme. On comprend leur psychologie, l’élan vital qui les pousse au bien ou au mal…
Balzac a réutilisé des personnages à la fois masculins et féminins pour donner une apparence de vérité à la société de son temps.
Nous en avons sélectionné six qui nous ont paru particulièrement intéressant.
Dans bon nombre de romans de la Comédie humaine, on trouve ainsi Rastignac.
Il est ce pauvre pensionnaire de la maison Vauquer qui assiste à l’enterrement du père Goriot.
Puis, il devient l’amant de Delphine de Nucingen à qui il doit son succès (Maison Nucingen) et sa richesse avec la bénédiction d’un mari complaisant.
Dès lors, Rastignac est reçu dans le Tout-Paris sans que les circonstances de son ascension sociale pourtant connues ne lui soient reprochées (Contrat de mariage, Cabinet des Antiques, Ursule Mirouët, Splendeurs et misères des courtisanes).
Il devient secrétaire d’État (une ténébreuse Affaire) avant d’épouser la fille de sa maîtresse (Député D’Arcis).
Enfin, il est fait ministre, comte et pair de France.
Dans un autre registre, l’avoué Derville, jeune étudiant en droit du Quartier latin est devenu au fil des pages de la Comédie humaine un professionnel intègre et reconnu sur la place parisienne. (Père Goriot, Gobsek, Splendeurs et misères des courtisanes, les Employés etc…). Dans le Colonel Chabert, il montre son intérêt pour le misérable sort du « revenant ».
C’est le médecin lui aussi bon et intègre de la Comédie humaine (père Goriot, Muse du département, etc…). Il connaît également une ascension professionnelle saisissante. C’est un des personnages secondaires de la somme romanesque qui apparaît 89 fois.
Chez les femmes, on voit souvent des aristocrates aux multiples aventures.
C’est la femme à la mode d’une élégance rare, qui se promène en majesté comme égérie dans la Comédie humaine (Interdiction, Bal de Sceaux, Père Goriot, Mémoires de deux jeunes filles, Cabinet des antiques). C’est une croqueuse d’hommes, un dom Juan au féminin. Son caractère en fait une femme prodigue, cruelle, médisante, perverse. Elle accède au titre de princesse de Cadigan, mais elle est ruinée. C’est encore le temps pour elle de séduire un jeune écrivain avant qu’elle ne fasse plus parler d’elle pour favoriser le mariage de son enfant (Les secrets de la princesse de Cadigan).
Elle représente l’intrigante en personne. Elle est partout, fait la pluie et le beau temps, ruine des réputations. (Illusions perdues, Splendeurs et misères des courtisanes, Le contrat de mariage, le père Goriot, Les secrets de la princesse de Cadigan). Elle fait et défait des carrières : son pouvoir est immense, sa rancune sans limite.
Madame de Sérizy
Madame de Sérizy à la réputation sulfureuse est une femme du monde qui enchaîne les liaisons avec des hommes vulgaires dont elle se lasse vite. (Femme de Trente ans, Ursule Mirouët, duchesse de Langeais, La fausse maîtresse).
Dans Splendeurs et Misères des courtisanes, elle manque de devenir folle de désespoir à l’annonce de la mort de Lucien de Rubempré.
À côté de tous ces personnages récurrents, il existe un être hors de la « bonne société » qui réapparaît à trois reprises dans la Comédie Humaine : il s’agit de Vautrin...
Source :
F. Marceau, Balzac et son monde, Tel Gallimard
repère à suivre : le cas Vautrin