Analyse-Livres & Culture pour tous
16 Mars 2020
Bac 2020 : dans Alcools, les machines évoquées par Apollinaire ont toutes un trait en commun, les moyens modernes de communication. On y trouve les moyens de locomotion, mais aussi la presse et la publicité.
Repères : thème de la modernité poétique : étude
Dans l’article précédent, nous avons examiné la vision neuve de la ville dans ce recueil, nous allons poursuivre aujourd’hui avec l’entrée en scène du développement technologique dans Alcools d’Apollinaire. Ce dernier entend expressément « machiner la poésie comme on a machiné le monde. »
https://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99Esprit_nouveau_et_les_po%C3%A8tes
Prenons si vous le voulez bien cette expression au sens propre avant d’examiner dans un prochain article son sens figuré.
Le recueil s’ancre dans une réalité technologique inédite. La modernité entre de plain-pied dans l’univers de la poésie. C’est en effet tous les progrès de la Révolution industrielle qui se trouvent concentrés dans ce recueil. On peut les subdiviser, d’abord les inventions, puis le machinisme.
La première des inventions qui revient avec récurrence, c’est l’électricité.
L’électricité au gaz (Zone L.30), c’est la lumière urbaine par excellence qui permet de voir les ombres de la nuit et le monde interlope des bars, cafés avec sa clientèle d’habitués.
Mais cette invention joue un rôle dans le travail intime du poète qui peut non seulement regarder le monde qui l’entoure, mais également composer à toute heure du jour et dans tout lieu.
« Et les roses de l’électricité s’ouvrent encore
Dans le jardin de ma mémoire »
https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Fian%C3%A7ailles
(Fiançailles II, vers 6-7)
Avec ses mots, il fait entrer l’électricité dans le champ poétique en recourant à une métaphore bucolique, dans un style finalement classique, si l’on pense à Ronsard. Ainsi l’association rose (fleur) et électricité (technologie) produit un effet d’éclosion (mouvement naturel). Pour Apollinaire, la modernité est porteuse de fraîcheur et d’authenticité.
L’électricité permet aussi la mise en route des tramways, circulant dans beaucoup de villes du monde et pas uniquement à Paris. La généralisation de la technologie est synonyme de modernisme. C’est là encore un prétexte à rattacher le bruit de la machine à une musique.
« Soirs de Paris ivres du gin
Flambant de l’électricité
Les tramways feux verts sur l’échine
Musiquent au long des portées
De rails leur folie de machines »
(Voie Lacté II L. 9)
https://fr.wikisource.org/wiki/La_Chanson_du_mal-aim%C3%A9
On ne sera pas étonnés que les machines évoquées aient toutes un trait en commun, la communication. On trouve les moyens de locomotion, mais aussi la presse et la publicité.
Dans Alcools, toutes ces inventions ont pour objet de montrer l’incroyable mouvement de la vie. Le poète s’en donne ainsi à cœur joie pour enchanter les progrès industriels afin de les rendre dignes d’un recueil poétique. Pour ce faire, Apollinaire utilise trois types de figures de style : les comparaisons, les métaphores ou des personnifications.
Ainsi on voit apparaître :
On peut donc considérer l’entrée en poésie des machines de la Révolution industrielle.
Il vous sera proposé dans l’article suivant d’examiner le sens figuré de l’expression d’Apollinaire visant à « machiner la poésie » ce qu’il fait notamment en retirant toute ponctuation.
Repère à suivre : la ponctuation dans Alcools (Apollinaire)