Analyse-Livres & Culture pour tous
25 Novembre 2021
Dans Si c’est un homme, Primo Levi explique les motivations de ce livre, témoignages et libération de lui-même. L’acte d’écrire est un acte de résilience.
Repères : résilience : résilience littéraire
Dans l’article précédent, nous avons présenté la notion de de résilience littéraire et posé la problématique de notre étude : le fait d’écrire, un facteur de résilience ? Nous tenterons d’y répondre en nous fondant sur l’acte d’écrire chez Primo Levi.
Nous verrons aujourd’hui que l’écriture est considérée comme un acte de libération et donc de résilience. Il vous est proposé une présentation vidéo de l’écrivain.
Résistant italien, Primo Levi est arrêté à 24 ans en décembre 1943. Aux autorités, il préfère se déclarer juif que de confesser son appartenance à un groupe de combat antifasciste. Il croit échapper à la torture et à la mort ; il n’imagine pas l’enfer que lui ouvrent les portes d’Auschwitz. De février 1944 à janvier 1945, il sera soumis au joug concentrationnaire avant de travailler dans un camp satellite où il intègre une unité de chimie, puis l’infirmerie, ce qui lui épargne une de ces fatales marches de la mort.
Dans sa préface du mois de janvier 1947, Primo Levi* explique les motivations de ce livre. Elles sont apparemment extérieures lorsqu’il veut « fournir des documents à une étude dépassionnée de certains aspects de l’âme humaine ». Il tient en effet son objectif.
L’acte d’écrire se comprend comme l’acte de décrire. Ses souvenirs d’Auschwitz sont d’une précision extrême ; ils sont présentés dans leur caractère brut. Le poids des évènements, des paroles et des actes, n’en est que plus saillant. Le mal absolu, c’est Auschwitz.
Mais c’est en réalité une motivation personnelle qui transparait lorsqu’il dit dans cette même préface que :« c’est avant tout en vue d’une libération intérieure ». Il tire du silence son expérience concentrationnaire pour le mettre en mots. C’est un acte de résilience pure.
On est à la sortie de la guerre lorsque Primo Levi entreprend la rédaction de son livre. Pour lui, l’écriture lui fournit un retour à la vie, à la paix et c’est aussi un moyen de redevenir un homme**. Son récit reprend un poème extrait d’un recueil poétique Shemà qui est mis en exergue, Si c’est un homme qui donnera le titre au livre.
Ce poème vise à l’interpellation du lecteur, lequel est invité à ne jamais oublier la barbarie humaine et à la vigilance. Dans un autre ouvrage, la trêve, il dit que : « paradoxalement, mon bagage de souvenirs atroces devenait une richesse, une semence : Il me semblait, en écrivant, croître comme une plante. » **
Dans l’article suivant, nous verrons que ce livre a mis 43 ans avant de devenir une œuvre de référence du fait d’une parole enserrée par le silence.
Repère à suivre : une parole enserrée par le silence
*Primo Levi, Si c’est un homme, préface, Pocket, pages 7 et 8
**J.Semprun, l’écriture ou la vie, folio, page 321 et 322