Analyse-Livres & Culture pour tous
22 Avril 2019
Paris sous la nuit offre un univers particulier : c'est aussi un lieu de rencontres avec une femme mystérieuse que ce soit dans le roman de Soupault, les dernières nuits de Paris que dans celui de Jean-Paul Delfino, pêcheurs d'étoiles.
Repères : thème de Paris : étude
Dans l’article précédent, nous avons rappelé le plan de l’étude consacrée à une folle échappée parisienne entre mystères et poésie au travers de la lecture croisée de deux romans emblématiques que nous avons préalablement présentés :
Après l’examen du premier point commun qui les lie, à savoir la déambulation dans Paris la nuit, découvrons aujourd’hui l’univers singulier de Paris la nuit.
Dans les dernières nuits de Soupault, la rencontre d’une femme se trouve à l’origine de toutes les déambulations. Assis dans un café, le narrateur capte ainsi le sourire d’une fille de joie laquelle va l’obséder durant de nombreuses nuits :
« Elle souriait si drôlement que je ne pouvais m’empêcher de regarder son visage lunaire et peut-être que malgré moi, je répondais à son sourire comme l’on répond à un miroir. »(page 7)
La dénommée Georgette se lève, il la suit aussi simplement que cela. Il est loin d’imaginer qu’elle va le faire entrer dans un monde interlope. D’ailleurs, jamais il ne le voit ainsi. Tout lui semble normal alors que l’on assiste, en fait, à une distorsion de la réalité. Pour lui, tout s’effectue de manière naturelle.
Nous verrons que le propos de ce roman surréaliste a pour objet de nous faire entrer de plain-pied dans un univers atypique. Vous constaterez que ce n’est pas cette étrangeté qui résonne dans le second roman, alors qu’il se situe en pleine période surréaliste. Non ! C’est surtout son côté parfaitement jubilatoire ; on y découvre une invitation à la fantaisie, la poésie et à la vie…
Le chapitre 1erdes pêcheurs d’étoiles situe le cadre de l’action dans un café, à l’heure des chansonnettes, des concours de bras de fer et enfin des bagarres soudaines. Deux personnages hauts en couleurs, Blaise Cendrars et Erik Satie, s’y rencontrent. Et ce n’est pas par hasard, le musicien cherche activement le poète.
Pourquoi ?
Déjà bien avinés, les deux hommes, qui se connaissent sans pour autant être des amis, discutent, en effet, de Cocteau, l’intellectuel phare de l’époque et aussi le maître de la nuit parisienne. Satie est en colère à son égard. Que lui reproche-t-il exactement ? Il lui fait grief de s’être emparé d’un livret de ballet écrit par Cendrars pour lui-même. C’est ainsi que la discussion sur la paternité et le destinataire de l’œuvre surgit.
Mais dans ce café-là, tout peut basculer ; n’importe quel regard posé peut entraîner soudainement une mauvaise querelle. Le frêle Satie devient bien malgré lui la proie d’un Russe ivre particulièrement belliqueux ; il ne doit son salut qu’à sa fuite avec Cendrars.
Or, en quittant les lieux, le musicien est saisi sur place par une vision, celle de Biqui, alias le peintre Suzanne Valadon, qu’il croit reconnaître dans les vapeurs de tabac et d’alcool. Ce souvenir d’un amour passé fait figure de prétexte à la lente déambulation dans Paris.
« Viens avec moi, ma vieille crapule. On va la trouver, ta Biqui. Même si on doit fouiller dans tout Paris, on va la trouver… » (page 63)
La visite s’inscrit dans une géographie parisienne particulière.
Repère à suivre : une géographie parisienne