Analyse-Livres & Culture pour tous
27 Mars 2019
Dans l'écharpe rouge, Yves Bonnefoy nous expose la découverte de vieux fragments oubliés au fil du temps. Trois brouillons inexploités et inexploitables qui comprennent une énigme encore insoluble. Il doit procéder à un travail d'archéologie, celle de sa mémoire. La littérature et l'autobiographie sont liées.
Repères : thème de l’autobiographie : étude
La première partie du récit nous présente la nature et l’enjeu des trois fragments inachevés de l’auteur. Au soir de sa vie, ce dernier cherche le dossier jaune qui contient dix pages d’une œuvre qu’il n’a jamais pu finir. Sa dernière tentative remonte en 2009, vaine comme toujours. À l’époque, il envisage de « déchirer »ce document pour faire du vide (page 37).
Il ne le fait pas. Sept ans plus tard, il se lance dans ce récit singulier. Quels sont donc ces documents inexploitables ?
Il s’agit de trois brouillons de vers libres composant un travail débuté en 1964 dans une perspective de publication officielle. Le titre, l’écharpe rouge,a été choisi, mais au fil des mots, l’inspiration va se tarir. Il s’avère, en effet, que l’auteur n’a jamais pu finir cette œuvre, pire, il n’a même pas pu la corriger. C’est donc un ensemble de textes inachevés et « inachevables ».
Que disent ces textes au juste ?
Il y est question d’un homme âgé qui décide de mettre de l’ordre dans ses archives en procédant à un tri. À cette occasion, il découvre notes, lettres et agendas du passé. Sur une « enveloppe vide, mais refermée » (page 20), il découvre le nom d’un homme et son adresse dans un hôtel à Toulouse. Ce souvenir lui remémore non «l’inconnu », mais un lieu précis ; après avoir vainement essayé de mettre de côté ce souvenir, il décide de reprendre contact avec lui. Les deux hommes ne se sont pas oubliés, un détail est évoqué : l’un des deux hommes portait une écharpe rouge. Le fragment s’achève sur un trajet en train. Notons la présence d’une femme plus ou moins ébauchée. Les deux autres fragments font figure de variantes sur ce thème.
Une énigme
La lecture de ces fragments place son auteur devant une inconnue. Quel est le sens de ces vers ? Pourquoi n’a-t-il jamais pu les reprendre ou les achever depuis toutes ces années ? Qu’est-ce qui en a tari l’inspiration ? L’auteur considère qu’il se trouve devant une énigme insoluble. C’est à la faveur d’un recueil publié en 2009, Deux scènes, contenant quelques éléments similaires qu’il réalise que les fragments relèvent manifestement de sa propre vie. Il tient enfin une piste ; il va la suivre jusqu’au bout.
Il décide donc de se lancer dans une enquête avec la recherche « d’indices »pour comprendre les motifs de l’inachèvement de cette œuvre. Il entreprend de se remémorer sa vie au travers notamment de la relation qu’il entretenait avec ses parents.
Il s’agit d’une archéologie personnelle, psychanalytique, le matériau de travail repose sur les textes des fragments, examinés, fouillés à l’aune de sa propre vie. Il décortique la biographie maternelle, puis celle paternelle et enfin la relation que ses parents avaient nouée entre eux avant qu’il se mettre lui-même en lumière, lui l’enfant qui aimait tant les mots...
La méthode choisie tient ses promesses, car au chapitre 7, il possède enfin la clef du mystère ainsi que nous le verrons dans le prochain article….
Repère à suivre : fragments d'une ascendance