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Analyse-Livres & Culture pour tous

Gazette littéraire

Éden, une séparation avec le reste du monde (Bosco, Bassani)

L’inaccessibilité du jardin est une problématique des deux romans en cours d'analyse, l'âne Culotte de Bosco et le jardin des Finzi-Contini de Bassani. C'est un lieu fermé et réservé. Il prend la forme d'une retraite choisie par temps mauvais ou d'un paradis terrestre à l'abri des hommes.

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repères : thème du jardin : l’étude

 

Dans une première partie, nous avons présenté les deux jardins, objets de notre étude fondée sur la lecture des ouvrages suivants :

Il nous reste à établir le lien entre l’attrait irrésistible de ces lieux et le fait qu’ils soient séparés du monde.

 

Il s’avère que dans les deux cas, les propriétaires condamnent l’entrée de leur jardin au commun des mortels. C’est précisément cette inaccessibilité qui confère à ces endroits ce lustre incomparable. Il s'agit d'une retraite choisie pour Les Finzi-Contini (1) et un lieu pur à l'abri des humains dans le roman d'Henri Bosco (2).

 

La lecture de ces deux romans conduit à une représentation du jardin d’Eden commune : ce lieu clos n’est rendu hautement désirable que parce que son accès est précisément restreint. 

 

1. Retraite choisie 

Le jardin des Finzi-Contini est un lieu clos à l’image de la porte cochère dont on sait qu’elle est dépourvue de poignées sur l’extérieur. On n’y entre que si l’on est invité. Or cette riche famille a fait le choix de vivre en recluse. Elle passe donc pour le commun des mortels pour être abusivement fière et orgueilleuse.

 

Pour en connaître les véritables raisons, il faut lire l’incipit flamboyant du roman. La crainte de la mort justifie que les Finzi-Contini aient décidé de ne pas se mélanger à la population. Au fil de la lecture,  il est enfin clairement question d’un choix hygiéniste. (page 146)

 

Dans ce contexte, le jardin apparaît donc comme un lieu inaccessible pour les habitants de Ferrare en général et pour le narrateur de l’histoire, en particulier. Cette circonstance l’intrigue au plus haut point depuis qu’il admire les deux enfants, Alberto et surtout la blonde Micòl :

 

« … voici précisément qu’apparaissaient Alberto et Micòl Finzi-Contini : nullement éperdus eux, habitués comme ils l’étaient depuis des années à se présenter et à triompher. Peut-être légèrement ironiques, en particulier à mon égard, lorsque traversant le hall, ils me voyaient au milieu de mes camarades et me saluaient de loin, d’un signe de tête et d’un sourire. Mais toujours bien élevés, peut-être même trop bien élevés, et gentils : tout à fait comme des hôtes.» (page 44)

 

Le parc délimite donc la fracture sociale entre deux mondes qui ne se côtoient pas en dehors des fêtes juives. Il faudra l’intervention de faits extérieurs bien précis pour que les portes du jardin des Finzi-Continis’ouvrent avec les conséquences tragiques qui vont de pair. 

 

Il n’en va pas de même avec Fleuriade dans le roman d’Henri Bosco.

 

2. Le Paradis terrestre 

Pour monsieur Cyprien, créateur de ce nouveau paradis terrestre, il n’est pas concevable de le laisser à la vue de ses contemporains. Il n’y a pas de considérations sociales en la matière. Comme on l’a vu, l’ancien marin veut faire aboutir son projet un peu fou. Pour ce faire, il a choisi un lieu hors de portée des hommes.

 

C’est ainsi que des suspicions, des fantasmes, voire bien des superstitions surgissent. En effet, ce qui entre ou ce qui sort de Fleuriade est donné par l’âne Culotte, sorte de messager. Dans cette perspective, le règne animal collabore activement à ce Paradis. Au passage de la bête, on rit, on se moque au village ; on s’en étonne aussi avec un certain malaise. D’autant que Culotte officie en apportant au vu et au su de tous la quintessence de ses richesses, à savoir des fleurs incomparables par brassées ou de belles branches d’amandiers.

 

À cet égard, on apprend que de nombreux villageois ont une conception différente des choses : « … personne, chez nous, ne touche à l’amandier au moment de la floraison. L’arbre semble sacré ; et, même pour fleurir l’autel de la vierge (…), il ne trouvera jamais une femme de nos villages qui consente à offrir à son église un de ces beaux rameaux fragiles et odorants… » (Récit de Constantin Gloriot, page 58). 

On comprend donc que monsieur Cyprien ne s’embarrasse guère des interdits des hommes, il transgresse sans le savoir, tout occupé par la réalisation de son projet divin.

 

Par ailleurs, il n’en a parlé qu’à l’abbé Chichambre, le curé, qu’il a invité à deux reprises sur place. Cet homme de foi ouvert et généreux assiste avec étonnement à la métamorphose du jardin. Il entrevoit aussi le risque de l’entreprise avec une lucidité incroyable. Il a même un douloureux pressentiment : le serpent qu’il découvre dans la branche d’amandier offert laisse en effet augurer un mauvais présage. 

 

Il reste que ce lieu où règne une quasi-harmonie entre le végétal et l’animal attend la venue d’une autre personne, Constantin Gloriot, qui est attiré par le mystère de cette haute montagne ainsi que l’on a pu le voir précédemment…

 

Repère à suivre : l’ouverture sous la pression des évènements politiques (Bassani)

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